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Pour clore l'année 2010

Article évolutif

Ce billet évoluera en fonction de mes dernières découvertes de l'année 2010.

En effet, des films seront à voir ou revoir pour 3 € la place du 12 au 18 janvier (Les Incontournables Le Figaro, salles UGC) et du 19 au 25 janvier (Festival Télérama, salles art et essai).

Dans ma ligne de mire pour les découvertes : Mystères de Lisbonne (4h26... mais prix Louis Delluc, qui s'est rarement trompé), le nouveau Claire Denis (White material), et trois films de cinéastes un peu/beaucoup surestimés me semble-t-il à savoir Tamara Drewe (Stephen Frears), The Social network (David Fincher) et Fantastic Mr Fox (Wes Anderson).

**** MYSTERES DE LISBONNE (Raoul Ruiz, 20 oct)
C'est un film fleuve de 4 heures et demie, où les nombreuses rivières font les grandes fortunes (au sens ancien de destinées). Il s'agit d'une commande de la télévision portugaise pour adapter le roman éponyme de Camilo Castelo Branco. Le résultat est donc d'une profusion narrative réjouissante : on y croise, entre autres, un orphelin souffre-douleurs de ses camarades d'internat, un curé mystérieux (son protecteur), un aristocrate ayant fait fortune au Brésil, une épouse tyrannisée par le mari choisi par son père, une noble française voulant réparer un affront etc... Formellement, la mise en scène est tout sauf académique : bien que conçu pour la télévision, le film est filmé le plus souvent en plans séquences dont l'inventivité, dans les mouvements de caméra, dans la profondeur de champ, fait le sel (par exemple, tout ses intriguants sont épiés dans leurs discussions intimes par leurs domestiques !). Un sommet dans la carrière de Raoul Ruiz...

*** FANTASTIC MR FOX (Wes Anderson, 17 fév)
Un renard, marié et père de famille, abandonne les vols de poule pour une vie bien rangée. Mais l'instinct d'animal sauvage revient... L'animation, qui fait parfois penser aux films de Nick Park, est aussi belle que simple. Par ailleurs, Wes Anderson ose l'anthropomorphisme, mais heureusement aux antipodes de la mièvrerie et du sentimentalisme. Ici, les rapports entre les membres de la famille, notamment masculins, font penser aux interrogations des précédents films en chair et en os de l'auteur. Une brillante comédie déguisée en film d'animation.

** SOUND OF NOISE (Ola Simonsson, Johannes Stjärne Nilsson, 29 déc)
Ils avaient déjà réalisé un court-métrange étonnant. Qui ? Cette demi-douzaine de percussionnistes suédois auteurs d'hilarants attentats musicaux. S'y ajoute un personnage de policier prénommé Amadeus, né dans une famille de grands musiciens et qui est allergique à la musique. C'est assez gratuit (trop pour être vraiment culte), mais c'est assez inventif.

** TAMARA DREWE (Stephen Frears, 14 juil)
Une journaliste vedette retourne dans le village où elle a grandi. Dans une des fermes du village, un écrivain auteur de polars à succès recueille des collègues moins chanceux. Le décor est planté pour ce qui ressemble de prime abord à un jeu de massacres, mais qui vire plutôt à la comédie de moeurs plus classique. Loin de l'audace d'un Woody Allen, Stéphen Frears adapte joliment, en bon faiseur, un roman graphique de Posy Simmonds.

** WHITE MATERIAL (Claire Denis, 24 mar)
Dans une ancienne colonie française d'Afrique, la guerre civile rôde. Maria (Isabelle Huppert), patronne d'une plantation de café, veut rester coûte que coûte, pour une année de récoltes (et de profits) supplémentaires... Le scénario, coécrit par Marie Ndiaye, pourraît prêter à des fulgurances de tension, et ce n'est que très rarement le cas. Comme si Claire Denis était moins à l'aise que dans des films en apparence plus mineurs et en réalité plus intenses. Reste le beau travail des Tindersticks pour la musique, comme à l'accoutumée.

** THE SOCIAL NETWORK (David Fincher, 13 oct)
Le sujet est audacieux : la résistible ascension de Mark Zuckerberg, l'inventeur de Facebook. Le film n'est ni une hagiographie ni un portrait à charge. Le problème c'est que ce n'est pas grand chose. On ne ressent ni attraction ni répulsion pour ces jeunes gens narcissiques et dénués d'affect. Et David Fincher ne trouve pas la bonne distance : les dialogues au débit hyper-rapide sont filmés en plan très courts, ce qui ne me semble pas un très bon choix. On ne s'ennuie pas mais cela me semble assez plat.

** CABEZA DE VACA (Nicolas Echevarria, 22 déc)
Un film mexicain, resté 20 ans au fond des cartons avant de sortir en France, et qui raconte le destin contrarié d'un conquistador espagnol venu chercher l'Eldorado au XVIè siècle, a priori c'est alléchant. Cela commence un peu comme Aguirre de Werner Herzog (comparaison écrasante), cela continue différemment, vers le film d'apprentissage, il y a quelques scènes insoutenables, mais le film a du mal à se hisser à la hauteur de son sujet.

* LE SENTIMENT DE LA CHAIR (Roberto Garzelli, 29 déc)
Une histoire d'amour entre un jeune radiologue (Thibault Vinçon, déjà vu dans Les Amitiés maléfiques (2006) et Memory Lane (2010)) et une étudiante passionnée d'anatomie (Annabelle Hettmann, une nouvelle venue). Ils se passionnent chacun pour le corps de l'autre, y compris l'intérieur (les radios, IRM etc sont des images érotiques pour eux). Sur le papier, ça va. Sur l'écran, malgré l'implication des interprètes, cela a du mal à s'incarner. Du coup, la fin (que je ne raconterai pas) est assez raide...
Version imprimable | Films de 2010 | Le Lundi 10/01/2011 | 0 commentaires
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Mon top 15 de 2010 (complété fin janvier 2011)

Sans commentaires

A quelques heures du gong, voici mon classement (pour les commentaires, voir mes billets précédents) :

1. Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu (Woody Allen, Etats-Unis)
2. Mystères de Lisbonne (Raoul Ruiz, Portugal/France)
3. Mourir ? Plutôt crever ! (Stéphane Mercurio, France)
4. Illégal (Olivier Masset-Depasse, Belgique)
5. Entre nos mains (Mariana Otero, France)
6. Dans ses yeux (Juan José Campanella, Argentine)
7. Les Arrivants (Claudine Bories, Patrice Chagnard, France)
8. Pauline et François (Renaud Fély, France)
9. Poetry (Lee Chang-dong, Corée du sud)
10. Nostalgie de la lumière (Patricio Guzman, France/Chili)
11. Kill me please (Olias Barco, Belgique)
12. Toy story 3 (Lee Unkrich, Etats-Unis)
13. Memory Lane (Mikhaël Hers, France)
14. Rubber (Quentin Dupieux, France)
15. Shutter island (Martin Scorsese, Etats-Unis)

Viennent ensuite A serious man (Ethan et Joël Coen, Etats-Unis), Le Temps des grâces (Dominique Marchais, France), Yo tambien (Alvaro Pastor, Antonio Naharro, Espagne), Tout ce qui brille (Hervé Mimran, Géraldine Nakache, France), Another year (Mike Leigh, Grande-Bretagne), Solutions locales pour un désordre global (Coline Serreau, France), The Ghost writer (Roman Polanski, Grande-Bretagne/France/Allemagne), Fantastic Mr. Fox (Wes Anderson), Gainsbourg (vie héroïque) (Joann Sfar, France), Air doll (Hirokazu Kore-eda, Japon) etc...
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Films de novembre/décembre

Nouveaux films :
  • Bien : Kill me please (Olias Barco), Memory lane (Mikhaël Hers), Rubber (Quentin Dupieux), Another year (Mike Leigh), Inside job (Charles Ferguson), Potiche (François Ozon), De vrais mensonges (Pierre Salvadori), Le Nom des gens (Michel Leclerc)
  • Pas mal : Ce n'est qu'un début (Jean-Pierre Pozzi, Pierre Barougier), Les Emotifs anonymes (Jean-Pierre Améris), Le Président (Yves Jeuland)
  • Bof : Holiday (Guillaume Nicloux)
Kill me please (Olias Barco, sortie le 3 novembre)

Il y a un peu plus de cinq ans, Mar adentro de Alejandro Amenabar prenait partie contre l'acharnement thérapeutique et pour l'euthanasie lorsque tout autre choix se révèle inhumain. Il le faisait à sa manière, lourdingue (gros mélo manichéen, avec les "gentils" membres d'une association d'accompagnement de fin de vie et les "méchants" membres de la famille, faisant passer égoïstement leur refus du travail de deuil avant le soulagement des souffrances intolérables d'un des leurs). Kill me please prolonge le débat, en le déplaçant sur le terrain beaucoup plus élégant de la comédie noire. Les auteurs ont imaginé une clinique spécialisée dans le suicide médicalement assisté. Les patients sont donc des éclopés de la vie, qui n'attendent plus rien d'elle, parfois à tort. Si l'humour est grinçant ou noir, le regard sur les personnages est toujours empathique, jamais méprisant. Et la satire de nos sociétés modernes n'est pas loin. Un excellent ovni belge, dans un noir et blanc à couper au couteau !

Memory lane (Mikhaël Hers, sortie le 24 novembre)

Un groupe de jeunes, autour de 25 ans ou un peu plus (un âge assez peu représenté au cinéma), passe le mois d'août dans la ville du 9-2 où ils ont grandi. Chacun a ses raisons... Un premier long métrage déjà très maîtrisé mais sans esbroufe. Contrairement à un certain cinéma commercial, rien n'est souligné. C'est petit à petit que l'on apprend des choses sur les personnages, sur leurs liens de sang, ou d'amitié ou plus si affinités. Mais on est captivé par eux dès le départ, par l'excellence de l'interprétation : Thibault Vinçon (découvert dans Les Amitiés maléfiques), Dounia Sichov, Stéphanie Déhel, Lolita Chammah, Thomas Blanchard pour les jeunes, Marie Rivière (échappée de chez Rohmer) et Didier Sandre pour la génération précédente ; mais aussi par la qualité du regard que Mikhaël Hers pose sur eux. Au final, un beau portrait d'une jeunesse déjà affectée par la fragilité de la vie (notamment sociale et familiale).

Rubber (Quentin Dupieux, sortie le 10 novembre)

C'est le deuxième film de Quentin Dupieux (je n'ai pas vu le premier), mais c'est un cinéaste à suivre, en tout cas si l'on aime les objets cinématographiques non identifiés. En effet, c'est l'histoire d'un serial killer télépathe, qui sévit dans le désert californien. Mais ce serial killer est... un pneu ! Rubber est donc un hommage un peu barré mais très cinéphile aux films de genre. Qui plus est, le second (voire troisième) degré est omniprésent, à travers une certaine mise en abyme : les spectateurs du film sont représentés sous la forme de touristes qui suivent l'action à travers des jumelles. Et le shérif connaît ses classiques (cinématographiques). Bref, un ovni complet dans le cinéma français, ce qui fait du bien...

Another year (Mike Leigh, sortie le 22 décembre)

Be happy (2008), le précédent film de Mike Leigh, était une heureuse surprise pour moi, qui n'avait pas été très enthousiaste à la vision de Secrets et mensonges, Palme d'or en 1996 (à la place, selon moi, de Breaking the waves !). Après avoir vu ce nouveau film, je tire une nouvelle fois mon chapeau à Mike Leigh. C'est un très bon opus. On y croise un couple de "gens bien", Tom le géologue (qui a néanmoins le défaut de ne pas trop soucier de l'utilité sociale ni des conséquences écologiques des projets qu'il accompagne) et Gerri (psychologue dans un cabinet médical), qui essaie de rendre service à tout un chacun, à commencer par Mary, secrétaire dans le cabinet de Gerri, célibataire qui aime beaucoup la vie et un peu trop l'alcool. Tous les personnages, y compris ceux que l'on voit très peu, sont intéressants dans cette comédie humaine très attachante.

Inside job (Charles Ferguson, sortie le 17 novembre)

Si vous n'avez pas vu l'excellent Cleveland contre Wall Street (2010), et que vous avez envie de comprendre la crise financière et économique que nous traversons, ce documentaire fera parfaitement l'affaire. Le film est assez didactique et percutant (enfin dans un film à grand public - c'est en tout cas sa vocation - une analyse non néolibérale de la crise et de ses causes). Le réalisateur interroge sans complaisance un certain nombre de protagonistes de la finance mondiale. Il a raison de pointer la fausse gauche aux Etats-Unis qui a libéralisé la finance (comme le reste). Il aurait pu faire de même avec DSK (qui passe presque pour un modéré et c'est dommage). Heureusement qu'à la fin du film, il en remet une couche sur le rôle déterminant des inégalités sociales et des injustices fiscales dans la sphère réelle : c'est bien de celle-ci qu'est partie la crise des subprimes qui a ensuite contaminé le monde de la finance avant de revenir dans la sphère réelle.

Potiche
(François Ozon, sortie le 10 novembre)

S'il y a un invariant dans le cinéma de François Ozon, c'est justement qu'il nous prend toujours à contre-pied, qu'il déjoue nos attentes, et souvent pour le meilleur. Ce film-ci est à ranger parmi ses réussites, on pourrait parler de vaudeville politique. Il retrouve le clinquant de Huit femmes (2002), les années 70 sont reconstituées jusqu'à saturation (Jérémie Rénier, coiffé façon Claude François !). Mais le film fait beaucoup référence à la situation ici et maintenant trente ans plus tard. On jurerait que Fabrice Luchini et Catherine Deneuve se sont inspirés des deux finalistes de la dernière présidentielle. Et Gérard Depardieu réussit à être convainquant en représentant de la classe ouvrière (un vrai rôle de composition pour ce sarkozyste !). De ce point de vue, la fin est assez sarcastique et pas si happy que cela...

De vrais mensonges (Pierre Salvadori, sortie le 8 décembre)

Pierre Salvadori est un grand réalisateur de comédies (notamment Cible émouvante (1993), dont un remake anglais est sorti cet été, voir Petits meurtres à l'anglaise). Ici, on sent l'influence de la screwball comedy (la comédie américaine de l'âge d'or). Audrey Tautou campe une coiffeuse qui reçoit une lettre d'amour anonyme de son employé à tout faire (Sami Bouajila), et envoie la missive à sa mère esseulée (Nathalie Baye). Prélude à toutes sortes de situations, de quiproquos, de gags ou de dialogues. Salvadori retrouve la forme !

Le Nom des gens (Michel Leclerc, sortie le 24 novembre)

Une comédie romantique politique ! Arthur Martin (Jacques Gamblin) est virologue et jospiniste, d'origine savamment occultée. Bahia Benmahmoud (Sara Forestier) est une jeune femme d'origine algérienne revendiquée, et, elle, elle défend une vraie gauche, pas celle d'accompagnement du capitalisme. Pour cela elle a une méthode militante originale : elle couche avec ses adversaires politiques (qu'elle nomme "fachos") pour les faire changer d'avis, et apparemment ça marche... Les deux vont se rencontrer. Le film fourmille d'inventions scénaristiques et formelles, presque trop (ça peut un peu tout mélanger, parfois). Les deux interprètes principaux sont excellents, mais il faut saluer également les interprètes des parents : Zinedine Soualem et Carole Franck côté Bahia, et Jacques Boudet et Michèle Moretti côté Arthur...

Ce n'est qu'un début (Jean-Pierre Pozzi, Pierre Barougier, sortie le 17 novembre)

Un documentaire sur un atelier philo à la maternelle. Si, si, ça existe, et c'est même dans un quartier populaire et métissé. La bande-annonce était irrésistible, le film est plus modeste que cela. Comment des garçons et des filles de 4 ou 5 ans arrivent-ils à parler de l'amour, de la mort, de morale ou d'autorité ? Eh bien, de façon inattendue, décalée, et parfois complètement à côté de la plaque, ce qui fait le charme et la limite de ce documentaire. Par contre, on en ressort avec l'idée qu'il serait bien que cette initiative pédagogique fasse tâche d'huile...

Les Emotifs anonymes (Jean-Pierre Améris, sortie le 22 décembre)

Les timides maladifs ont leur cercle de thérapie de groupe les Emotifs Anonymes, à l'instar des Alcooliques Anonymes (en tout cas, c'est ce qu'imagine le film). Angélique (Isabelle Carré) y va. Elle y raconte ses premiers rapprochements avec son nouveau patron Jean-René (Benoît Poelvoorde), atteint du même syndrôme qu'elle, mais elle ne le sait pas encore. Les deux acteurs sont touchants, bien qu'on reste à la surface des personnages, constamment ramenés à leur tare. Un film qui cherche à fédérer mais qui est très quelconque. Est-ce encore du cinéma ?

Le Président
(Yves Jeuland, sortie le 15 décembre)

Le documentaire suit Georges Frêche au cours de sa dernière campagne électorale, pour sa réélection à la présidence de la région Languedoc-Roussillon. C'est assez maladroit, car le personnage, tel qu'il est filmé, paraît sympathique, alors qu'il fait une campagne cynique, dénuée de toute idée et de tout programme, avec des conseillers, notamment en communication, sans aucune morale. Un documentaire qui risque de pousser à l'abstention ou à la non inscription sur les listes électorales, alors qu'il existe des forces politiques modestes certes mais vertueuses (qui vont même jusqu'à respecter le résultat des référendums, ce qui est assez rare depuis 2008).

Holiday (Guillaume Nicloux, sortie le 8 décembre)

Guillaume Nicloux retrouve Jean-Bernard Pouy, coscénariste de son premier et meilleur film Le Poulpe (1998), pour un Cluedo dans un hôtel crapoteux du Sud-Ouest. Pourquoi pas : il y a des situations qui font sourire, ainsi que la résolution de l'énigme. Reste qu'il n'y a guère d'idée de cinéma, et que les personnages ne sont pas regardés avec la même empathie qu'ils l'auraient été par un cinéaste belge ou Grolandais...
Version imprimable | Films de 2010 | Le Jeudi 23/12/2010 | 0 commentaires
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Les films de la rentrée

Nouveaux films :
  • Chef d'oeuvre absolu : Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu (Woody Allen)
  • Bravo : Mourir ? Plutôt crever ! (Stéphane Mercurio), Illégal (Olivier Masset-Depasse), Entre nos mains (Mariana Otero)
  • Bien : Pauline et François (Renaud Fély), Nostalgie de la lumière (Patricio Guzman), Fin de concession (Pierre Carles), Les Amours imaginaires (Xavier Dolan), Simon Werner a disparu... (Fabrice Gobert)
  • Pas mal : Petit tailleur (Louis Garrel), Happy few (Antony Cordier), Oncle Boonmee (celui qui se souvient de ses vies antérieures) (Apichatpong Weerasethakul), Piranha 3D (Alexandre Aja), La Vie au ranch (Sophie Letourneur), Inception (Christopher Nolan), Chantrapas (Otar Iosseliani), Un homme qui crie (Mahamat-Saleh Haroun)
  • Bof : Au fond des bois (Benoît Jacquot), Des hommes et des dieux (Xavier Beauvois)

Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu
(Woody Allen, sortie 6 octobre)

C'est la 34è fois que j'ai vu un film de Woody Allen, et là il est arrivé à me surprendre encore une fois. Je pense que c'est un des sommets de sa carrière. En apparence, on suit une demi-douzaine de citadins anglo-saxons et plus cultivés que la moyenne. Woody Allen poursuit le thème du destin, présent dans ses derniers films depuis Melinda et Melinda (2005). Les réparties sont à la fois cinglantes et profondes (quel art de la litote !), mais l'ironie se niche dans l'ensemble de la mise en scène. L'utilisation de la voix off, parfois si fonctionnelle dans des films ordinaires, est ici géniale et virtuose, la musique joue également un rôle important. La magie intervient, mais sa fonction n'est pas d'apporter une touche fantastique, mais donne l'occasion d'une scène de spiritisme férocement drôle et grinçante. On peut trouver de multiples interprétations au film (c'est un chef d'oeuvre), voici modestement la mienne. Poussés par l'hyperindividualisme contemporain, les personnages cherchent tous à se réaliser, ils ne sont ni bons ni mauvais, mais en étant inattentifs aux autres, ils prennent des mauvaises décisions. Les seuls personnages qui s'en sortent vivent avec des chimères... Conclusion personnelle : voilà ce qui arrive quand on hypertrophie la dimension individuelle et qu'on atrophie les dimensions collective et politique !

Mourir ? Plutôt crever ! (Stéphane Mercurio, sortie 13 octobre)

Stéphane Mercurio est une cinéaste très talentueuse. En 2008, elle avait réalisé A côté, un formidable documentaire sur les prisons tout en ne filmant que hors les murs. Ici, elle fait le portrait du dessinateur satirique Siné, de ses dernières années (avec l'aventure Siné Hebdo) et de l'ensemble de son oeuvre : on voit beaucoup de dessins de toutes les époques. A priori, vu le sujet, on pourrait penser à Choron dernière de Pierre Carles, sorti l'an dernier. En fait, il fait davantage penser à un autre film de Pierre Carles : La Sociologie est un sport de combat (2001). Même empathie avec le personnage principal, qui peut donc se livrer facilement et transmettre à chacun le goût du courage et de la fidélité à des valeurs. Enfin, le film est rempli d'humour et permet de comprendre le gouffre entre grossièreté et vulgarité.

Illégal (Olivier Masset-Depasse, sortie 13 octobre)

Avant de vous expliquer pourquoi j'aime beaucoup le film, voici le paragraphe d'introduction de la critique de "Télérama" (on ne saurait mieux écrire) : "Après huit ans de clandestinité en Belgique, Tania, une immigrée russe, et son fils, un adolescent de 14 ans, essaient de vivre normalement malgré le risque permanent d'un contrôle de police. Elle travaille et l'enfant va à l'école. Un jour, Tania est arrêtée et enfermée dans un camp de rétention, dans l'attente de son expulsion. Elle n'a plus qu'un seul but : préserver l'avenir de son fils". Le metteur en scène choisit de mettre sa comédienne Anne Coesens (qui joue Tania) dans presque tous les plans (souvent serrés). Ainsi la dureté du film n'anéantit pas le spectateur, mais le pousse au contraire à l'indignation et à la révolte, surtout lorsqu'on sait que c'est une fiction inscrite dans le réel.

Entre nos mains (Mariana Otero, sortie 6 octobre)

Ce très beau documentaire a pour but de montrer la naissance d'une SCOP. Ce sont les délégués syndicaux de Starissima, une entreprise de confection de lingerie, qui en ont avancé l'idée pour reprendre leur entreprise, placée en faillite. On y voit l'idée faire son chemin parmi les salarié-e-s, le projet collectif progresser, mais aussi, car ce n'est pas un conte de fées, les difficultés de l'exercice, notamment par rapport à leur ancien patron et à la grande distribution. On y entend une ouvrière remettre en cause la logique capitaliste, peut-être involontairement, lorsqu'elle dit : " Ma part d'intéressement au bénéfice [qu’elle reverse dans la Scop], je ne l’avais pas vraiment gagnée par mon travail ". Je n'en dirais pas plus, pour ne rien déflorer, sinon que le film se clôt sur une scène de comédie musicale émouvante.

Pauline et François (Renaud Fély, sortie 22 septembre) / Des hommes et des dieux (Xavier Beauvois, sortie 8 septembre)

Voici le courrier que j'ai adressé, à propos de ces deux films, au "Masque et la plume" (France Inter), après l'émission du 19 septembre :

Cher "Masque",

Je dois vous avouer que je n'ai pas communié avec vos critiques unanimes à propos du film de Xavier Beauvois "Des hommes et des dieux". Certes j'ai bien aimé les acteurs, Michael Lonsdale en tête, mais j'ai trouvé le film trop solennel (et je n'ai d'ailleurs pas été ému par la scène du "Lac des cygnes"), la lumière clichetonneuse... Bref, bien qu'athée, je trouve que le film manque de grâce. Mon jugement sévère s'explique peut-être par contraste. En effet, la veille j'avais découvert en avant-première "Pauline et François", un premier film qui, lui, a la grâce, avec une caméra au plus près des personnages (formidables Laura Smet, Yannick Rénier et Léa Drucker), mais qui capte aussi magnifiquement les pulsations de la nature (la forêt est un personnage habité). Cette sismographie d'une rencontre est la plus belle que j'ai vu depuis "Lady Chatterley". J'espère que vous évoquerez ce film au prochain "Masque".


Nostalgie de la lumière (Patricio Guzman, sortie 27 octobre)

Patricio Guzman, documentariste chilien, auteur d'un remarquable Salvador Allende (2004), pose cette fois son regard dans le désert d'Atacama. Celui-ci est le lieu d'un observatoire astronomique mondialement connu (grâce à la qualité du ciel qu'offre cet endroit). C'est aussi ici qu'un certain nombre de femmes recherchent les restes de leurs parents disparus pendant la dictature du général Pinochet. Dans les deux cas, il y a recherche d'un passé (très lointain et stimulant pour les astronomes, encore très proche et douloureux pour les victimes de la dictature). Le film fuit l'émotion facile, nous élève et nous éloigne de l'actualité immédiate (sauf à dire, ce qui n'est pas rappelé dans le film, que le Chili de Pinochet fut le premier pays du monde à appliquer les politiques néolibérales, exportées ensuite en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis, puis un peu partout, avec le résultat que l'on sait).

Fin de concession (Pierre Carles, sortie 27 octobre)

Troisième volet de sa trilogie sur les médias après Pas vu pas pris (1998) et Enfin pris ? (2002), le film part de cette question taboue : Pourquoi la concession du canal hertzien de TF1 est-elle reconduite automatiquement au groupe Bouygues, alors que la chaîne n'a rempli aucune des promesses avancées lors de la privatisation (archives à l'appui) ? Et Pierre Carles repose la question de la critique des médias, de la critique d'un style de journalisme faible avec les forts et fort avec les faibles (la fausse impertinence), des connivences entre journalistes vedettes et les pouvoirs industriels et financiers et leurs relais politiques. Le film de Pierre Carles est un festival d'une salutaire impertinence, d'une audace inouïe, qui ne passera jamais dans les médias dominants (aucun film de Pierre Carles n'a été diffusé à la télévision). Mais c'est aussi un "work in progress", un document sur le film en train de se faire...

Les Amours imaginaires (Xavier Dolan, sortie 29 septembre)

Un garçon (interprété par Xavier Dolan lui-même, qui signe aussi scénario, montage et création des costumes !), et une fille, très amis, tombent amoureux du même jeune homme. Le très jeune cinéaste, qui n'a que 21 ans, dont c'est déjà le deuxième film, est un surdoué qui multiplie les audaces. Ainsi, on peut passer de scènes glamours ou très chics à des scènes de confessions intimes, face caméra, de jeunes gens (sans lien avec les trois personnages principaux) sur leurs déceptions sentimentales. Autre exemple, le choix des musiques, piochées parmi tous les genres musicaux ou presque, mais avec in fine cohérence. La démonstration d'un tel talent formel impressionne, mais peut-être au détriment du fond et des sentiments. Nul doute qu'avec la maturité Xavier Dolan saura élaguer pour aller à l'essentiel...

Simon Werner a disparu... (Fabrice Gobert, sortie 22 septembre)

Simon Werner, élève de terminale, a disparu. La résolution de l'énigme intéresse peu Fabrice Gobert (elle est d'ailleurs décevante). Mais le film a de nombreux atouts. D'une part, il rend justice aux adolescents, avec de vrais dialogues, ce qui n'est pas toujours le cas dans les teen movie. Peut-être est-ce dû également à l'époque choisie : 1992-1993 (on entend "Tostaky" de Noir Désir), c'est-à-dire avant l'irruption des téléphones portables. Mais surtout, la narration et le montage sont formidables. Chaque chapitre est filmé du point de vue d'un personnage différent. On revoit parfois la même scène sous un nouvel angle, ce qui change tout (un peu comme dans Rien de personnel de Mathias Gokalp, sorti l'an dernier, qui se situait dans le monde de l'entreprise).

Petit tailleur (Louis Garrel, sortie 6 octobre)

Louis Garrel est un jeune acteur irrésistible, notamment chez son père Philippe Garrel (Les Amants réguliers) ou Christophe Honoré (dans plusieurs films). Dans ce moyen métrage (48 mn), il raconte la rencontre fortuite entre un petit tailleur (à peine la trentaine) et une jeune comédienne de théâtre (Léa Seydoux, déjà lumineuse dans La Belle Personne... de Christophe Honoré !). Cela passe par de vives déambulations dans un Paris magnifié en noir et blanc. Bref, Louis Garrel se met dans les pas de ses maîtres, et c'est très charmant.

Happy few (Antony Cordier, sortie 15 septembre)

Deux couples se rencontrent, puis forment un quatuor amoureux, inteprété par les magnétiques et/ou sensuels Marina Foïs, Roschdy Zem, Elodie Bouchez, Nicolas Duvauchelle. Du côté des réserves, on pourra dire que ces personnages sont déconnectés du monde réel : par exemple, vis-à-vis de leurs employeurs, ils assouplissent leurs emplois du temps à loisir, ou encore avoir des enfants leur pose à peine problème... Heureusement l'essentiel, et ce qui frappe, c'est le réalisme de la description et de l'évolution de leurs désirs et de leurs sentiments, présentés dans leur complexité. Sur un sujet voisin, le film est donc bien meilleur que Peindre ou faire l'amour (2005) des inégaux frères Larrieu.

Oncle Boonmee (celui qui se souvient de ses vies antérieures) (Apichatpong Weerasethakul, sortie 1er septembre)

L'oncle Boonmee du titre est un exploitant agricole, veuf, malade, sans doute au soir de sa vie. Au cours d'un dîner, il revoit sa femme défunte (apparition en hologramme) puis reçoit la visite d'un singe aux yeux rouges qui est la réincarnation de son fils disparu (scène magnifique). Apichatpong Weerasethakul (dont j'avais déjà vu Blissfully yours) a un univers très particulier. Il distille dans son film des moments de poésie uniques, mais au milieu d'une oeuvre assez lente (qu'on a presque envie de voir en accéléré). Même si c'est mieux que le bruit et la fureur, cela risque de décevoir les spectateurs attirés par la Palme d'or, qui finalement ne rend service ni au film, ni aux Palmes d'or futures...

Piranha 3D (Alexandre Aja, sortie 1er septembre)

C'est le week-end de Pâques dans la ville de Lake Victoria aux Etats-Unis. Un tremblement de terre survient et ouvre, sous le lac, une faille d'où s'échappent des milliers de piranhas... Pendant ce temps là, à la surface et aux rives du lac se tient le "Spring Break", fête où les jeunes décompressent et se lâchent, du genre concours de T-Shirt mouillé. Le jeu de massacre peut commencer... Les spectateurs de gauche se réjouiront que les piranhas s'attaquent aux corps siliconés, bodybuildés, au superficiel, à l'apparence, à l'ostentation, et épargnent ceux qui ont un peu de plomb dans la cervelle. Quand au spectateur de droite, il aura de quoi arguer que ce sont les valeurs de la famille bourgeoise traditionnelle qui l'emportent. Un film malin donc, qui fait un peu sursauter et pas mal ricaner...

La Vie au ranch (Sophie Letourneur, sortie 13 octobre)

Les réalisatrices femmes sont encore trop peu nombreuses dans le milieu du cinéma. La Vie au ranch comble un peu cette lacune, en suivant un groupe de jeunes étudiantes parisiennes, à peine sorties de l'enfance, très solidaires, dont certaines se partagent un appartement (le fameux "ranch"). Lors de la projection, il y avait plus de spectatrices que de spectateurs dans la salle, alors que ça pourrait satisfaire une certaine curiosité masculine. Il faut un temps d'acclimatation pour s'adapter à l'énergie du film, entre amusement et agacement. Pour les spectateurs plus âgés que les personnages, on est quand même content d'être sorti de cet âge là... Un premier film b(r)ouillon.

Inception (Christopher Nolan, sortie 21 juillet)

J'ai longtemps hésité avant d'aller voir ce nouveau film (le succès de l'été) de Christopher Nolan, que j'avais perdu de vue depuis Memento et Insomnia (que je recommande). L'idée de pénétrer dans les rêves et souvenirs d'autrui pour y changer quelque chose était déjà présente dans Eternal sunshine of the spotless mind, de Michel Gondry. Ici, le scénario, signé Christopher Nolan lui-même, est d'une sophistication géniale. Néanmoins, le film peine à rendre tangible la nature si particulière des rêves (contrairement au Gondry). Leonardo Di Caprio assure en veuf tourmenté, mais dans un emploi similaire il est plus intéressant dans Shutter Island, le dernier Scorsese. Enfin, pourquoi une construction scénaristique aussi complexe pour deux heures de poursuites et de fusillades ? Tout ça pour ça...

Chantrapas (Otar Iosseliani, sortie 22 septembre)

C'est l'histoire d'un cinéaste qui fuit la censure politique en Géorgie (période URSS) pour Paris où il achoppe sur une censure économique... Il y a une réelle part évidente d'autobiographie, mais cela reste une fable visuelle, comme il nous en a déjà donné l'habitude. Cependant, le film est parfois assez déroutant, et ce n'est pas celui que je conseillerais pour entrer dans son univers (le plus réussi, à mon goût, étant Adieu, plancher des vaches, sorti en 1999).

Un homme qui crie (Mahamat-Saleh Haroun, sortie 29 septembre)

Au Tchad, un homme âgé partage avec son jeune homme de fils la fonction de maître nageur dans un hôtel. Mais l'emploi se réduit et la guerre civile avance. Malgré son ancrage dans la réalité, le film n'est pas un documentaire, mais une fable narrativement robuste, qui a obtenu le prix du jury à Cannes cette année. Toutefois, il ne faut pas masquer que c'est un film très dur. Et à mes yeux d'une dureté qui assomme plutôt que d'une dureté qui fait réfléchir.

Au fond des bois (Benoît Jacquot, sortie 13 octobre)

Un film très ambitieux qui fusionne le genre romantisme passionné et le genre fantastique à une incandescence rarement atteinte. Les images, magnifiques, sont signées Julien Hirsch, comme pour Lady Chatterley (on reconnaît sa patte). La mise en scène ne souligne rien, il y a de multiples interprétations possibles à chaque plan. Sauf que trop, c'est trop. Des centaines de fois je suis sorti du film, des centaines de fois je suis à nouveau rentré dedans. Mais mon impression générale a quand même été celle d'un film peu supportable.
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Survol des films de l'été

Bonjour,
Un petit survol des films de l'été, par ordre chronologique des sorties (qui n'est pas l'ordre dans lequel je les ai vus).

Mes notes :
LLLLL : Chef d'oeuvre absolu (pour moi le dernier c'était "Parle avec elle" d'Almodovar... en 2002 !)
LLLL : Bravo
LLL : Bien
LL : Pas mal
L : Bof
o : Hélas

30 Juin
"Tournée" (Mathieu Amalric) L
Une des déceptions de l'été. Tout désarçonne. On ne comprend pas pourquoi on appelle les numéros de ces stripteases du New Burlesque : ces femmes non formatées ne sont pas ridicules, elles sont magnifiques. Malheureusement, un montage à la serpe nous empêche de voir donc de comprendre un numéro entier. Pire, on zappe tellement d'une femme à l'autre qu'elles n'arrivent pas à constituer des personnages à part entière. Enfin, il n'y a pas un seul plan de bien cadré, on dirait du Cassavetes très mal digéré... Comment ce film a-t-il pu obtenir le Prix de la mise en scène à Cannes, prix qui récompense souvent de meilleurs films que la Palme d'or (*) ?

7 Juillet
"Petits meurtres à l'anglaise" (Jonathan Lynn) LLL
C'est un savoureux remake de "Cible émouvante" de Pierre Salvadori, une des meilleures comédies françaises des années 1990. D'ailleurs en VO le film s'appelle "Wild target". Le film est assez respectueux de l'original, donc très drôle. Les rôles de Jean Rochefort (tueur à gages-vieux garçon-sentimental), Marie Trintignant (cible émouvante) et Guillaume Depardieu (apprenti-tueur) sont respectivement tenus avec brio par Bill Nighy, Emily Blunt et Rupert Grint.
Rétrospective Pierre Etaix LLL
Les films burlesques de Pierre Etaix, réalisés dans les années 1960 et invisibles pendant plus de 20 ans pour d'obscures questions de droits, ont constitué une des gourmandises du festival de La Rochelle cette année (compte-rendu à suivre). Si vous n'en voyez qu'un, je vous conseille "Le Grand amour", le plus drôle, très poétique sur un thème rebattu (un homme marié fantasme sur sa nouvelle et jeune secrétaire). L'intégrale de Pierre Etaix (5 longs et 3 courts) sort en DVD à l'automne.

14 Juillet
"L'Autre monde" (Gilles Marchand) L
Deuxième film de Gilles Marchand, l'heureux réalisateur de "Qui a tué Bambi" et heureux scénariste de "Harry, un ami qui vous veut du bien". Vraiment pas terrible, malgré les interprètes (Grégoire Leprince-Ringuet, Pauline Etienne, Melvil Poupaud), et le splendide dos callipyge de miss Louise Bourgoin. Les jeux dangereux en bagnole, resucée de "La Fureur de vivre", ne sont plus vraiment crédibles à notre époque. Un film un peu réac sur le fond (Internet montré que du mauvais côté) et assez insipide sur la forme (n'est pas David Lynch qui veut).
"Toy story 3" (Lee Unkrich) LLL
Mon premier Pixar a été "Toy story 2", et ça m'avait bien marqué. Une dizaine d'années et de films plus tard, ça tient encore la route. La série se bonifie avec le temps, l'idée de départ est toujours géniale, et le film est épatant. Un des meilleurs films de divertissement de l'année, où le second degré n'efface jamais le premier. Par contre, la vision en 3D n'apporte pas grand chose, et vous pouvez le voir en 2D (ce qui vous fera économiser 2 euros) sans perdre le plaisir.

21 Juillet
"Yo tambien" (Alvaro Pastor, Antonio Naharro) LLL
Un film sur la différence, qui montre le rapprochement entre un mongolien surdoué (diplômé, spirituel) et une femme "normale". Il y a plein de choses super bien vues, un des films les plus émouvants de l'été, mais sans grosses ficelles. Très belles interprétations de Pablo Pineda et Lola Duenas (déjà remarquée chez Almodovar, dans "Volver").

4 Août
"Un poison violent" (Katell Quillévéré) LL
Premier amour et première foi (sans s) d'une adolescente de 14 ans. Moi le mécréant ai été plutôt touché par cette histoire. Les votants aux Cesar remarqueront les seconds rôles de Lio (à contre-emploi) et Michel Galabru et surtout Clara Augarde en (très) jeune espoir féminin. Un film néanmoins surestimé par la critique.

11 Août
"L'Arbre" (Julie Bertuccelli) LLL
En ouverture du festival de La Rochelle, ce film (de genre) m'a surpris (de la part de la réalisatrice de "Depuis qu'Otar est parti") et favorablement impressionné. Un film constamment à la lisière (si j'ose dire) du fantastique ; la fillette de 8 ans (Morgana Davies) joue étonnamment bien.

18 Août
"D'amour et d'eau fraîche" (Isabelle Czajka) LLL
En seulement deux films ("L'année suivante" et celui-ci), Isabelle Czajka a imposé son style, qui montre l'absurdité du mercantilisme, de la (dis)société de consommation et, disons-le, du capitalisme, tout en racontant une véritable histoire (elle ne théorise pas). En étudiante Bac+5 qui cherche un emploi de commerciale, Anaïs Demoustier est très bien (comme d'habitude). La deuxième partie du film n'égale pas la première, malgré le charisme irrésistible de Pio Marmaï.
"Crime d'amour" (Alain Corneau) L
J'ai vu le film avant le décès d'Alain Corneau, et je ne l'ai pas trouvé terrible. Même un Chabrol au sommet de la paresse ferait beaucoup mieux. Au départ, tout sonne faux, même si c'est un peu normal dans le milieu inhumain des cadres d'une multinationale. Ensuite, le scénario est carré (ce qui n'est pas si mal), sauf à la toute fin. En résumé, malgré Ludivine Sagnier, un film qui laisse un peu sur la faim.
Bref, si vous voulez (re)voir du Corneau, je vous conseille "Le Choix des armes" (1981), avec une distribution du tonnerre (Gérard Depardieu, Yves Montand, Catherine Deneuve, Gérard Lanvin, Richard Anconina), ou "Les Mots bleus" (2005), un film avec Sylvie Testud et Sergi Lopez qui m'a beaucoup touché.
"Cleveland contre Wall Street" (Jean-Stéphane Bron) LLL
2010 est décidément une année riche en documentaires ! La crise des subprimes expliquée à ma fille, ou presque... Le 11 janvier 2008, Josh Cohen et ses associés, avocats de la ville de Cleveland, assignent en justice les 21 banques qu'ils jugent responsables des saisies immobilières qui dévastent leur ville... Grâce à une armée d'avocats, Wall Street parvient à bloquer la procédure. Alors Jean-Stéphane Bron décide de créer ce procès devant sa caméra. Tout est identique à un vrai procès (avocats de l'accusation et de la défense, témoins, jurés), et rien n'a été écrit d'avance : le réalisateur a découvert les témoignages au fur et à mesure qu'il les filmait, sans parler du verdict...

25 Août
"Le Bruit des glaçons" (Bertrand Blier) LL
Le titre est déjà du pur Blier. Un écrivain alcoolique (Jean Dujardin) reçoit la visite de son cancer (Albert Dupontel). C'est très noir, je l'ai vu le lendemain de la mort d'Alain Corneau et le soir même du décès de Laurent Fignon, et c'est très grinçant. Même si ce n'est pas le Blier de la grande époque ("Beau-père", "Trop belle pour toi", "Merci la vie"), on est content d'avoir de ses nouvelles...
"Poetry" (Lee Chang-dong) LLL
Une sexagénaire vit dans des conditions modestes avec son petit-fils adolescent. Aide à domicile pour des personnes plus âgées qu'elle, elle s'inscrit à un cours de poésie, puis découvre que son petit-fils a participé à une tournante... Le film a eu le prix du scénario à Cannes, mais c'est surtout la lumière de ce très beau personnage de femme qui émeut, au milieu du sordide. Un des grands films de l'année !

(*) A titre d'exemples :
"Les moissons du ciel" (mise en scène Cannes 1979) > "Apocalypse now" (Palme d'or 1979)
"Fargo" (mise en scène Cannes 1996) > "Secrets et mensonges" (Palme d'or 1996)
"Le Général" (mise en scène Cannes 1998) > "L'Eternité et un jour" (Palme d'or 1998)
"Tout sur ma mère" (mise en scène Cannes 1999) > "Rosetta" (Palme d'or 1999)
"Yi yi" (mise en scène Cannes 2000) > "Dancer in the dark" (Palme d'or 2000)
"Mulholland Drive" (mise en scène Cannes 2001) > "La Chambre du fils" (Palme d'or 2001)
"Ivre de femmes et de peinture" (mise en scène Cannes 2002) > "Le Pianiste" (Palme d'or 2002)
"Exils" (mise en scène Cannes 2004) > "Fahrenheit 9/11" (Palme d'or 2004)
"Caché" (mise en scène Cannes 2005) > "L'Enfant" (Palme d'or 2005)
"Le Scaphandre et le papillon" (mise en scène Cannes 2007) > "4 mois, 3 semaines et 2 jours" (Palme d'or 2007)
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Les films de mai/juin et quelques autres

Suggestion de fête

Nouveaux films :
  • Bien : Air doll (Hirokazu Kore-Eda), Les Femmes de mes amis (Hong Sang-soo), Policier, adjectif (Corneliu Porumboiu), Les Petits ruisseaux (Pascal Rabaté)
  • Pas mal : Nannerl, la soeur de Mozart (René Féret), When you're strange (Tom DiCillo), L'Illusionniste (Sylvain Chomet), 8th Wonderland (Nicolas Alberny, Jean Mach), Les Secrets (Raja Amari), Les Mains en l'air (Romain Goupil), L'Enfance du mal (Olivier Coussemacq), Année bissextile (Michael Rowe), Lola (Brillante Mendoza)
Reprises :
  • Bravo : Les Moissons du ciel (Terrence Malick)
  • Bien : Les Trois jours du condor (Sydney Pollack), Ces messieurs-dames (Pietro Germi), Traître sur commande (Martin Ritt), Crime passionnel (Otto Preminger)
  • Pas mal : Les Chaussons rouges (Michael Powell, Emeric Pressburger)
Par ordre chronologique inverse de mes découvertes :

J'y allais sans être convaincu d'avance, et j'ai été agréablement surpris par Les Petits ruisseaux de Pascal Rabaté (sorti le 23 juin), sur la vie amoureuse et sexuelle des seniors. Le thème avait déjà été excellemment traité par Andreas Dresen dans Septième ciel (un de mes films préférés de 2008), et j'avais peur que le film de Pascal Rabaté, inpsiré de sa propre BD (que je n'ai pas lue) souffre de la comparaison. En fait, si le début est presque franchouillard, avec le personnage de Philippe Nahon, la suite est une alchimie étonnante de crudité et de pudeur. Le film convainc de plus en plus, au fur et à mesure de son déroulement, par son culot et sa finesse. Bulle Ogier et Hélène Vincent sont très bien, mais Daniel Prévost est formidable dans un registre inattendu et mérite à lui seul le détour. Plus que pas mal.

Un documentaire musical sur les Doors, par le réalisateur sympathique de Ca tourne à Manhattan ? Pourquoi pas ! Malgré un fil rouge désarçonnant (des images, dont on ne comprend pas bien le statut, d'une ballade en voiture d'un Jim Morrisson méconnaissable) et des extraits musicaux trop courts, le documentaire When you're strange (sorti le 9 juin) est de belle facture. Moi qui écoutais leur dernier album (L.A. Woman, avec Riders on the storm) sans connaître leur histoire, j'ai appris pas mal de choses. Et, anecdotiquement, je trouve que Jim Morrisson a une petite ressemblance physique et vocale avec Bertrand Cantat, deux chanteurs intelligents et charismatiques qui ont pourtant détruit leur vie...

J'attendais beaucoup de L'Illusionniste (sorti le 16 juin), le nouveau film de Sylvain Chomet (le réalisateur des Triplettes de Belleville), sur un scénario de Jacques Tati (dont j'adore Jour de fête et Mon oncle). Le film raconte l'histoire d'un illusionniste à la fin des années 50, ringardisé dans les music-halls par le rock naissant. Seule une jeune fille écossaise, à l'âge indéfinissable (ce qui est gênant), l'apprécie et se lie d'amitié avec lui. Les films de Jacques Tati ne sont pas réacs, Mon oncle est par exemple une satire réussie de la société de consommation, un film écolo avant l'heure, mais le film de Sylvain Chomet est curieusement passéiste. Certains gags, drôles en chair et en os, sont moins impressionnants dans un film d'animation. Quelques réserves donc mais un film globalement agréable.

Air doll de Hirokazu Kore-Eda (sorti le 16 juin) raconte l'histoire d'une poupée gonflable qui prend vie ! Cela pourrait être trivial, et même s'il ne recule devant rien, ce film fantastique a paradoxalement son côté existentiel et interroge rien moins que la condition humaine, particulièrement l'ultra-moderne solitude urbaine. Le tout dans le rythme faussement indolent cher au cinéaste. Sans atteindre le sommet d'After life, c'est l'un des meilleurs films de la période. Gonflé mais pas gonflant.

J'ai réalisé il y a peu que les rééditions de classiques bénéficiaient de sorties nationales, comme les nouveautés. Et comme ils sont souvent disponibles en DVD, ma rubrique "Reprise" n'est pas tout à fait inutile !

"Ressorti" il y a quelques mois, Les Chaussons rouges est le film le plus connu de Michael Powell, mais ce n'est pas mon préféré. C'est un drame de la danse, qui ne manque pas de style, mais qui me semble plus lourd que certains autres films de lui que j'adore (Le Voleur de Bagdad, Une question de vie ou de mort, Le Voyeur). Et sur un thème voisin, je lui préfère Une étoile est née de George Cukor...

Les Moissons du ciel de Terrence Malick, ressorti le 16 juin, prix mérité de la mise en scène au festival de Cannes 1979, est une splendeur. La musique d'Ennio Morricone, les images superbes de Nestor Almendros, tant sur les visages que sur la nature, transcendent l'histoire, et encore le tout est encore meilleur que les parties. L'histoire ? C'est celle d'un ouvrier fondeur qui quitte Chicago pour se faire embaucher par un riche propriétaire terrien comme ouvrier agricole, avec sa petite soeur, et sa petite amie qu'il fait passer pour son autre soeur. La suite, allez la découvrir en salle, car c'est magnifique.

Année bissextile, sorti le 16 juin, est le film qui a reçu la Caméra d'or (récompensant le meilleur premier film) au dernier festival de Cannes. C'est la rencontre d'une femme avec un homme SM. Enfin lui dans le rôle sadique et elle gratifiée du rôle maso. Formellement, c'est très réussi et (dé)culotté. Sur le fond j'ai quand même du mal à ne serait-ce que comprendre les motivations du mec...

Figurez-vous que Wolfgang Amadeus Mozart avait une grande soeur musicienne prodige (voir http://fr.wikipedia.org/wiki/Nannerl_Mozart). En plus de ses talents d'interprète, le film de René Féret Nannerl, la soeur de Mozart (sorti le 9 juin) lui prête une liaison royale et des talents de compositrice. On retrouve la même mise en scène dépouillée que celle qui avait illuminé Comme une étoile dans la nuit (le précédent film de René Féret, l'un de mes préférés de 2008), mais cela ne sert pas forcément toujours le sujet. Un film néanmoins attachant.

Romain Goupil raconte la période sombre que nous subissons en France avec les rafles de sans-papiers, mais à travers les tribulations d'un groupe d'enfants de 10-12 ans. Je me méfie des leçons politiques de Goupil (je me souviens de ses prises de position atlantistes de 2003, voir aussi http://fr.wikipedia.org/wiki/Romain_Goupil), mais là ça va. Le film est sympathique, et le personnage joué par Valeria Bruni-Tedeschi (dont le beauf est qui vous savez) est savoureux. C'était le premier de Goupil que je voyais et cinématographiquement, c'est quelconque mais pas laid. Et le titre Les Mains en l'air est très bien trouvé !

J'ai rattrapé Crime passionnel, un film noir d'Otto Preminger que je n'avais pas encore vu. Femme fatale il y a, criminel aussi, mais pas forcément celle et celui que le début laisse présager. Avec un excellent Dana Andrews, aussi bon que dans Laura ou Mark Dixon, détective.

J'ai aussi beaucoup aimé Traître sur commande (The Molly Maguires) de Martin Ritt, sorte de Germinal d'outre-atlantique. L'histoire d'une société secrète de mineurs qui sabote les exploitations et est infiltrée par un arriviste... Très bonne interprétation de Sean Connery, Richard Harris et Samantha Eggar.

Ces messieurs-dames de Pietro Germi, qui a partagé la Palme d'or du festival de Cannes 1966 avec Un homme et une femme, n'est pas très connu, à tort. C'est une savoureuse comédie de moeurs innénarrable (ça tombe bien, j'avais la flemme de raconter) qui mérite le détour.

Retour au cinéma contemporain avec Les Femmes de mes amis (sorti le 5 mai) de Hong Sang-Soo. Tous les films de Hong Sang-Soo pourraient s'intituler Ivre de femmes et de biture (pour parodier un autre film sud-coréen), mais le cinéaste est inégal. Ce film-ci est une réussite, sans qu'on sache pourquoi les uns sont savoureux et les autres sont moyens. Bref, là je suis touché et amusé...

Sorti le 19 mai, Les Secrets est un film à la lisière du fantatisque réalisé par la tunisienne Raja Amari. Une sorte de huis-clos étouffant parabole de la condition de certaines femmes en Tunisie. J'ai un peu de mal avec la fin (que je ne raconterai pas plus que le début !), mais Hafsia Herzi trouve là son meilleur rôle depuis La Graine et le mulet.

8th Wonderland, sorti le 12 mai, est un film intéressant. Il imagine des activistes qui construisent un pays virtuel (le 8th Wonderland du titre), un genre de formidable réseau qui entend agir dans le monde réel. Les réalisateurs (Nicolas Alberny et Jean Mach) ont choisi de ne pas en faire un pays utopique (par exemple la peine de mort n'y est pas interdite), mais sans épargner non plus les horreurs du monde réel. Pas toujours convaincant formellement (par exemple tout est doublé en français), mais plutôt grinçant.

Policier, adjectif de Corneliu Porumboiu (sorti le 19 mai) est un polar minimaliste très intéressant. Un jeune policier est chargé de filer un lycéen soupçonné de trafic de haschich. Les scènes de filature se succèdent mais l'essentiel est ailleurs. Deux scènes sont irrésistibles : un délicieux ping-pong verbal entre le jeune policier et sa femme, et surtout sa confrontation avec son supérieur hiérarchique (interprété par Vlad Ivanov, le médecin de 4 mois, 3 semaines et 2 jours), où l'on comprend le titre malicieux du film. Un très bon exercice de style.

Beaucoup de cinéphiles parlent de Brillante Mendoza, alors je suis allé voir son dernier film Lola, sorti le 5 mai. L'histoire croisée de deux grands-mères liées par un fait divers : le petit-fils de l'une a tué le petit-fils de l'autre (mobile : un portable). Les scènes sont assez attendues, même si le film décrit aussi la misère de ce pays, les Philippines, miséreux et au climat assez difficile. Estimable oui mais passionnant non.

Auparavant, j'étais allé voir en avant première (avec présence du réalisateur) L'Enfance du mal, le premier film d'Olivier Coussemacq, sorti le 12 mai. Une jeune fille (Anaïs Demoustier, toujours très bien) s'incruste chez un couple de bourgeois (lui est avocat), formidablement interprétés par Pascal Greggory et la trop rare Ludmila Mikaël. Je ne peux pas en dire plus mais le film est très psychologique, trop en fait, et le personnage secondaire joué par Sylvian Dieuaide est peu convaincant. Mais le film ne manque pas de style.

Enfin, si vous avez l'occasion, vous pouvez (re)découvrir Les Trois jours du condor, de Sydney Pollack, un thriller parano avec Robert Redford, qui interprète un employé de la CIA qui épluche les romans policiers pour y déceler d'éventuelles allusions codées à des activités criminelles, et qui va se faire dépasser par les événements. Dès les premières minutes le ton est donné, et le film ne faiblira pas...

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Les films de mars/avril et quelques autres

Sorties depuis le 17 mars et reprises

Nouveaux films :
  • Bien : Dans ses yeux (Juan José Campanella), Les Arrivants (Claudine Bories, Patrice Chagnard), Tout ce qui brille (Géraldine Nakache, Hervé Mimran), Solutions locales pour un désordre global (Coline Serreau), Le Rêve italien (Michele Placido), La Révélation (Hans-Christian Schmid), Mammuth (Benoît Delépine, Gustave Kervern)
  • Pas mal : Nénette (Nicolas Philibert), Le Mariage à trois (Jacques Doillon), Soul kitchen (Fatih Akin), 8 fois debout (Xabi Molia), Greenberg (Noah Baumbach), L'Arnacoeur (Pascal Chaureil)
  • Bof : Blanc comme neige (Christophe Blanc), Les Invités de mon père (Anne Le Ny)
Reprises :
  • Bien : Les Poings dans les poches (Marco Bellocchio), Senso (Luchino Visconti), Camping Cosmos (Jan Bucquoy), La Vie est belle (Frank Capra)
  • Pas mal : La Vie sexuelle des belges (Jan Bucquoy), La Société du spectacle et ses conventions (Jan Bucquoy) 
  • Bof : La Jouissance des hystériques (Jan Bucquoy)
Un petit mot d'autopromotion pour commencer. Dans mon billet précédent, du 19 mars, je disais :
Sorti le 3 mars, le documentaire La Stratégie du choc, de Michael Winterbottom et Mat Whitecross, avec Naomie Klein, est un bon film altermondialiste, mais ceux qui sont convaincus d'avance n'apprendront pas grand chose. Pour les autres, un bon décortiquage des méthodes des ultra-libéraux, ce qui offre une certaine grille de lecture, notamment avec l'actualité grecque...

Bien vu, non ? Il arrive que les critiques de cinéma aient envie de faire de la politique... Donc, si le documentaire passe encore, notamment à Paris, courez-y. Cela vous fera voir le "plan d'aide" à la Grèce d'une autre façon. Merci aux parlementaires du Front de Gauche (Parti de Gauche, PCF) et à Nicolas Dupont-Aignan d'avoir sauvé l'honneur de la représentation parlementaire française, et honte aux autres d'avoir bafoué l'amitié entre les peuples...

A propos de documentaires, deux beaux spécimens sont sortis le 7 avril et sont à voir, si vous voulez faire votre devoir de citoyen. Le premier, Les Arrivants, suit le quotidien de la Cafda (Coordination pour l'accueil des familles demandeuses d'asile), un organisme parisien d'aide aux victimes de persécutions, venues du monde entier. Ce qui est bien et passionnant, c'est que l'on suit à la fois des demandeurs d'asile et les employés de cette petite structure qui a reçu une délégation d'Etat, mais pas forcément les moyens qui vont avec. Le droit d'asile, pourtant inscrit dans la Constitution, se porte bien mal au "pays des droits de l'homme", dans l'indifférence de l'opinion publique...

S'il est un sujet où l'opinion publique se sent concerné, c'est bien l'écologie. Mais traitée à toutes les sauces, elle recouvre le meilleur et le pire. Dans mes billets précédents, j'avais déjà déploré la naïveté forcée de l'écologie sponsorisée (Home, Le Syndrôme du Titanic) qui refuse d'appeler un chat un chat. Mais la tendance s'inverse enfin depuis quelques mois, avec d'abord le documentaire agricole Le Temps des grâces (voir billet précédent), et maintenant celui de Coline Serreau Solutions locales pour un désordre global. Mis à part son titre (les solutions ne sont pas que locales, il faut aussi combattre le système économique au niveau au moins national), il est très bien. La bonne idée, c'est de montrer des exemples de plusieurs continents. Mention spéciale aux microbiologistes du sol (spécialité qui se perd) Lydia et Claude Bourguignon et à la féministe indienne Vandana Shiva (oui la domination masculine a peut-être à voir avec les ravages de l'agriculture capitaliste moderne).

A part ça, je ne vais pas revenir forcément sur tous les films que j'ai cités, mais quelques mots de ci de là...

On ne quitte pas complètement le terrain politique avec La Révélation (sortie le 17 mars), thriller qui semble très juste sur le Tribunal Pénal International et les raisons d'Etat (notamment de l'Union Européenne). Avec deux actrices formidables : Kerry Fox (Intimité) et Anamaria Marinca (4 mois, 3 semaines et 2 jours)...

Elles (Leïla Bekhti et Géraldine Nakache) habitent Puteaux, un coin du 9-2 qui n'est pas encore un ghetto de riches, et elles rêvent des nuits parisiennes. Elles vont plus ou moins vite déchanter... C'est la trame de Tout ce qui brille (sortie le 24 mars), une comédie populaire plein de bonnes comédiennes (outre les deux personnages principaux, on savoure Audrey Lamy en prof de gym survoltée ou Virgine Ledoyen et Linh-Dan Pham en noceuses superficielles) et qui a le bon goût de déringardiser une vieille chanson de Véronique Sanson (sur sa drôle de vie). Une brillante réussite.

Déception en revanche pour le nouveau film de Christophe Blanc, dont j'avais aimé Une femme d'extérieur, son premier long métrage (10 ans déjà). Ici son thriller Blanc comme neige (sortie le 17 mars), avec François Cluzet et Louise Bourgoin et beaucoup d'invraisemblances ne me fait même pas peur. Dommage. En revanche L'Arnacoeur (sortie le 17 mars) de Pascal Chaureil remplit son contrat (sans plus !) de comédie débridée, avec beaucoup d'invraisemblances là aussi mais c'est fait exprès...

L'histoire de Nénette, la femelle orang-outan du jardin des Plantes m'a ému, racontée par les employés du Muséeum d'histoire naturelle au micro de Nicolas Philibert, le documentariste des espaces clos (Le Pays des sourds, La Moindre des choses, Être et avoir). Autre film sympathique la comédie culinaire Soul kitchen, même si ce n'est pas le genre qui réussit le mieux à Fatih Akin, l'auteur de l'excellent De l'autre côté (mon film préféré de 2007). On rit plutôt de bon coeur aux mésaventures dorsales ou non d'Adam Bousdoukos, même si le film montre une image dégradante de l'administration fiscale allemande...

A ceux que la vie psychique n'a pas épargnés, le mois d'avril offre deux films plutôt dignes : 8 fois debout, une comédie française légèrement satirique sur le marché du travail, avec Julie Gayet et Denis Podalydès, et Greenberg, une anti-comédie romantique qui révèle surtout Greta Gerwig, aux côtés d'une distribution sympathique (Ben Stiller, Rhys Ifans, Jennifer Jason Leigh). "Hurt people hurt people" ("les gens blessés blessent les gens", mais pas toujours). A noter que pour les Américains de Los Angeles, ne pas avoir de voiture est signe selon eux d'une grave tare. No comment...

Dans le style décalé, Benoit Delépine et Gustave Kervern assurent. C'est encore le cas avec Mammuth, leur dernier road-movie auquel se sont prêtés des stars : Gérard Depardieu, Yolande Moreau et Isabelle Adjani, même si la saveur vient parfois des plus brèves apparitions, de Dick Annegarn à Benoît Poelvoorde...

C'est le moment de vous parler d'un week-end un peu spécial consacré à Jan Bucquoy, artiste et cinéaste belge, ami de l'entarteur et créateur du Musée du slip (qui expose les dessous de gens célèbres, dans une visée égalitariste). Au cours des années 1990, il a commencé à réaliser son autobiographie filmée. Cela donne l'iconoclaste et touchant La Vie sexuelle des belges en 1995, suivi par le cultissime Camping Cosmos (la vie sexuelle des belges n°2) en 1997 (mêmes acteurs plus Lolo Ferrari dans ce film néanmoins drôle et intelligent). Ensuite, il quitte le genre fiction pour des essais plus ou moins réussis. J'ai eu un peu de mal avec La Jouissance des hystériques (la vie sexuelle des belges n°4, 2000), qui est une sorte de faux documentaire raté et presque malsain (des choses volées ?) : il est vrai que je l'ai vu dans la foulée des deux premiers épisodes, et je commençais à fatiguer. Beaucoup plus intéressant était en revanche La Société du spectacle et ses conventions (la vie sexuelle des belges n°6, 2002), vu le lendemain, inédit en France et qui donne furieusement envie de relire Guy Debord.

Moi qui ne supporte pas les consensus mous (ni les consensus durs, par exemple sur le dos du peuple grec), je dois avouer que j'ai bien aimé La Vie est belle de Frank Capra. A la fin, c'est le gentil (James Stewart), pourtant au bord du suicide, qui gagne, notamment contre un méchant capitaliste. L'Amérique de l'immédiat après guerre avait provisoirement tiré des leçons de la crise de 29, avant de les oublier, mais c'est une autre histoire...

J'aime énormément Jacques Doillon. Un peu moins son dernier film, Le Mariage à trois (sortie le 21 avril). Formellement, la mise en scène de ce marivaudage à plusieurs est brillante comme à l'accoutumée, mais la condition c'est qu'il faut s'intéresser à ces personnages assez narcissiques, et ça demande un peu / beaucoup d'efforts...

Enfin, je ne vais pas vous laisser sans parler de Dans ses yeux de Juan José Campanella, qui a reçu il y a quelques semaines l'Oscar du meilleur film étranger, et c'est mérité. Un policier qui arrive à la retraite se met à écrire et à se souvenir d'une affaire qui a eu lieu 25 ans plus tôt, et de sa toute jeune supérieure hiérarchique. Un film romanesque (c'est une adaptation) : ambiance, attention à tous les personnages, tout y est. Excellente interprétation, à commencer par Ricardo Darin, déjà excellent dans El aura il y a quelques années. C'est mon film préféré de ce début d'année, et il ne faut pas le manquer !

Si après tout ça vous n'êtes pas repus, je signale que, côtés reprises italiennes, j'ai bien aimé la subversion des Poings dans les poches de Marco Bellocchio (en copie neuve) et le classissisme de Senso de Luchino Visconti, mais j'ai un peu la flemme d'en parler davantage...
Version imprimable | Films de 2010 | Le Dimanche 09/05/2010 | 0 commentaires
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Films vus en janvier/février et quelques autres

Deuxième partie

Derniers films vus :

  • Bien : The Ghost writer (Roman Polanski), Crazy heart (Scott Cooper)

  • Pas mal : Le Rêve italien (Michele Placido), La Stratégie du choc (Michael Winterbottom, Mat Whitecross), L'Arbre et la forêt (Olivier Ducastel, Jacques Martineau)

Dimanche c'est le second tour des élections (avec un résultat hommage à Ferrat ?), mais dimanche, lundi et mardi prochains c'est aussi le printemps du cinéma.

Deux films récents que j'aime sentimentalement : Le Rêve italien et Crazy heart.

Le premier est un film d'inspiration autobiographique de Michele Placido sur l'année 1968 en Italie. Et je dois dire que le personnage masculin principal du film réalise un de mes fantasmes : emmener une étudiante idéaliste (interprétéé par Jasmine Trinca, déja vue chez Nanni Moretti) voir Les Parapluies de Cherbourg (le plus beau film du monde !). Si on me prend par les sentiments... Donc je n'ai pas un avis très objectif sur le film. Je l'ai aimé donc, même si le réalisateur, sans doute pour faire énergique, multiplie les plans courts, alors que pour savourer je préfèrerais qu'ils soient plus longs... A Lille, le film a été débarqué dès la deuxième semaine. Donc envoyez vos dons à l'ADFISCAJT (Association de Défense des Films Italiens Spécialement Ceux Avec Jasmine Trinca) !

Le second est une sorte de version US de Quand j'étais chanteur. Jeff Bridges, qu'on n'avait pas vu aussi bien depuis The Big Lebowski, interprète un chanteur de country qui a beaucoup bourlingué (4 mariages) et qui est un peu trop porté sur la bouteille. Il rencontre une jeune journaliste (Maggie Gyllenhaal, craquante, très "vraie"), mère célibataire d'un enfant de 4 ans. Une belle romance, où même les clichés (il n'y en a pas beaucoup) paraissent authentiques. Un beau film pour le coeur et les oreilles. Oscar pour Jeff Bridges, parait-il (c'est mérité).

A part ça, si je reprends les films dont je ne vous ai pas encore parlé dans l'ordre de leur sortie, je dois vous indiquer que j'ai beaucoup aimé A serious man, le dernier film des frères Coen (sorti le 20 janvier). C'est un film à l'ironie très sûre. L'introduction pourrait faire penser à du Woody Allen, le film est ensuite très maîtrisé, dans un enchaînement de situations cruel donc délectable. Le film se termine à un moment étonnant.

Un mot sur Océans, le documentaire animalier de Jacques Perrin et Jacques Cluzaud (sorti le 27 janvier). C'est très spectaculaire, la qualité des images témoigne d'un véritable exploit technique. Et en même temps, ce n'est que ça, donc ça s'oublie assez vite...

Le documentaire écolo qu'il faut voir c'est plutôt Le Temps des grâces (sorti le 10 février). Réalisé par Dominique Marchais, c'est une enquête sur l'agriculture, et c'est passionnant. Contrairement au dernier Depardon qui avait une approche surtout esthétique et sentimentale, là il s'agit de décortiquer l'évolution de l'agriculture depuis soixante ans, et c'est très dense. Mentions spéciales aux interventions de Marc Dufumier, Lydia et Claude Bourguignon, mais elles sont toutes intéressantes.

Un film belge à découvrir, s'il est toujours à l'affiche, c'est La Régate de Bernard Bellefroid (sorti le 17 février). Un adolescent de 15 ans, qui fait de l'aviron à un haut niveau, pour oublier une situation familiale délicate (battu par son père veuf). Cela pourrait être un téléfilm édifiant, mais tous les interprètes en font un film de cinéma digne. Si ce n'était pas de mauvais goût, j'écrirais que c'est un film coup de poing...

La Tisseuse (sorti le 24 février) est l'échappée romanesque d'une ouvrière chinoise atteinte d'un cancer à un stade avancé. En l'apprenant, elle quitte momentanément mari et fils pour s'offrir un voyage à Pékin, à la recherche d'un amour disparu, jamais oublié. Si ce genre de drame est malheureusement banal, il est filmé avec grâce par Wang Quan An, dont j'avais bien aimé Le Mariage de Tuya.

Je fais partie de ceux qui ne connaissaient pas le roman Shutter Island de Denis Lehane. Et j'ai beaucoup aimé le film éponyme de Martin Scorsese sorti le 24 février. Pourtant je ne suis pas un inconditionnel du réalisateur : je n'ai pas aimé Gangs of New-York, et je n'ai pas vu l'intérêt de faire un remarque de l'excellent Infernal affairs. Mais là j'ai été conquis par l'atmosphère, les personnages, et le twist final (un renversement de situation crédible a posteriori). Je n'en dis pas plus, mais c'est l'un des meilleurs films de ce début d'année.

Dans le genre thriller parano, il faut signaler aussi l'excellent film de Roman Polanski The Ghost writer, sorti le 3 mars. Ewan McGregor joue le rôle de nègre d'un ancien premier ministre britannique fictif (interprété par Pierce Brosnan). Le film n'évite pas les clichés, mais la mise en scène est brillante. Polanski a réalisé un film très antiaméricain...

Sorti le 3 mars, le documentaire La Stratégie du choc, de Michael Winterbottom et Mat Whitecross, avec Naomie Klein, est un bon film altermondialiste, mais ceux qui sont convaincus d'avance n'apprendront pas grand chose. Pour les autres, un bon décortiquage des méthodes des ultra-libéraux, ce qui offre une certaine grille de lecture, notamment avec l'actualité grecque...

Pour terminer, deux films "mémoriels" : Liberté (sorti le 24 février) et L'Arbre et la forêt (sorti le 3 mars).

Le premier est le dernier film de Tony Gatlif, sur la persécution des tziganes pendant l'Occupation. Si leur mode de vie est comme toujours bien rendu par Gatlif, le reste est un peu scolaire. Si c'est peut-être son film le plus important, ce n'est pas son film le plus réussi.

Le second évoque la persécution des homosexuels pendant l'Occupation, un secret de famille pour le personnage joué par Guy Marchand. Là aussi le sujet est inattaquable. Le film fait penser à du théâtre, tout en dialogues. Le résultat est digne, mais j'attendais mieux du tandem de réalisateurs Olivier Ducastel - Jacques Martineau, ceux-là même qui ont ouvert mes goûts à la comédie musicale avec leur premier film et chef d'oeuvre Jeanne et le garçon formidable.

Côté reprises, j'ai beaucoup aimé En quatrième vitesse et Pas d'orchidées pour Miss Blandish, tous deux de Robert Aldrich, et je vous en parlerai peut-être ultérieurement.

Version imprimable | Films de 2010 | Le Jeudi 18/03/2010 | 0 commentaires
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