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Les films de mars/avril et quelques autres

Sorties depuis le 17 mars et reprises

Nouveaux films :

  • Bien : Dans ses yeux (Juan José Campanella), Les Arrivants (Claudine Bories, Patrice Chagnard), Tout ce qui brille (Géraldine Nakache, Hervé Mimran), Solutions locales pour un désordre global (Coline Serreau), Le Rêve italien (Michele Placido), La Révélation (Hans-Christian Schmid), Mammuth (Benoît Delépine, Gustave Kervern)
  • Pas mal : Nénette (Nicolas Philibert), Le Mariage à trois (Jacques Doillon), Soul kitchen (Fatih Akin), 8 fois debout (Xabi Molia), Greenberg (Noah Baumbach), L'Arnacoeur (Pascal Chaureil)
  • Bof : Blanc comme neige (Christophe Blanc), Les Invités de mon père (Anne Le Ny)
Reprises :
  • Bien : Les Poings dans les poches (Marco Bellocchio), Senso (Luchino Visconti), Camping Cosmos (Jan Bucquoy), La Vie est belle (Frank Capra)
  • Pas mal : La Vie sexuelle des belges (Jan Bucquoy), La Société du spectacle et ses conventions (Jan Bucquoy) 
  • Bof : La Jouissance des hystériques (Jan Bucquoy)
Un petit mot d'autopromotion pour commencer. Dans mon billet précédent, du 19 mars, je disais :
Sorti le 3 mars, le documentaire La Stratégie du choc, de Michael Winterbottom et Mat Whitecross, avec Naomie Klein, est un bon film altermondialiste, mais ceux qui sont convaincus d'avance n'apprendront pas grand chose. Pour les autres, un bon décortiquage des méthodes des ultra-libéraux, ce qui offre une certaine grille de lecture, notamment avec l'actualité grecque...

Bien vu, non ? Il arrive que les critiques de cinéma aient envie de faire de la politique... Donc, si le documentaire passe encore, notamment à Paris, courez-y. Cela vous fera voir le "plan d'aide" à la Grèce d'une autre façon. Merci aux parlementaires du Front de Gauche (Parti de Gauche, PCF) et à Nicolas Dupont-Aignan d'avoir sauvé l'honneur de la représentation parlementaire française, et honte aux autres d'avoir bafoué l'amitié entre les peuples...

A propos de documentaires, deux beaux spécimens sont sortis le 7 avril et sont à voir, si vous voulez faire votre devoir de citoyen. Le premier, Les Arrivants, suit le quotidien de la Cafda (Coordination pour l'accueil des familles demandeuses d'asile), un organisme parisien d'aide aux victimes de persécutions, venues du monde entier. Ce qui est bien et passionnant, c'est que l'on suit à la fois des demandeurs d'asile et les employés de cette petite structure qui a reçu une délégation d'Etat, mais pas forcément les moyens qui vont avec. Le droit d'asile, pourtant inscrit dans la Constitution, se porte bien mal au "pays des droits de l'homme", dans l'indifférence de l'opinion publique...

S'il est un sujet où l'opinion publique se sent concerné, c'est bien l'écologie. Mais traitée à toutes les sauces, elle recouvre le meilleur et le pire. Dans mes billets précédents, j'avais déjà déploré la naïveté forcée de l'écologie sponsorisée (Home, Le Syndrôme du Titanic) qui refuse d'appeler un chat un chat. Mais la tendance s'inverse enfin depuis quelques mois, avec d'abord le documentaire agricole Le Temps des grâces (voir billet précédent), et maintenant celui de Coline Serreau Solutions locales pour un désordre global. Mis à part son titre (les solutions ne sont pas que locales, il faut aussi combattre le système économique au niveau au moins national), il est très bien. La bonne idée, c'est de montrer des exemples de plusieurs continents. Mention spéciale aux microbiologistes du sol (spécialité qui se perd) Lydia et Claude Bourguignon et à la féministe indienne Vandana Shiva (oui la domination masculine a peut-être à voir avec les ravages de l'agriculture capitaliste moderne).

A part ça, je ne vais pas revenir forcément sur tous les films que j'ai cités, mais quelques mots de ci de là...

On ne quitte pas complètement le terrain politique avec La Révélation (sortie le 17 mars), thriller qui semble très juste sur le Tribunal Pénal International et les raisons d'Etat (notamment de l'Union Européenne). Avec deux actrices formidables : Kerry Fox (Intimité) et Anamaria Marinca (4 mois, 3 semaines et 2 jours)...

Elles (Leïla Bekhti et Géraldine Nakache) habitent Puteaux, un coin du 9-2 qui n'est pas encore un ghetto de riches, et elles rêvent des nuits parisiennes. Elles vont plus ou moins vite déchanter... C'est la trame de Tout ce qui brille (sortie le 24 mars), une comédie populaire plein de bonnes comédiennes (outre les deux personnages principaux, on savoure Audrey Lamy en prof de gym survoltée ou Virgine Ledoyen et Linh-Dan Pham en noceuses superficielles) et qui a le bon goût de déringardiser une vieille chanson de Véronique Sanson (sur sa drôle de vie). Une brillante réussite.

Déception en revanche pour le nouveau film de Christophe Blanc, dont j'avais aimé Une femme d'extérieur, son premier long métrage (10 ans déjà). Ici son thriller Blanc comme neige (sortie le 17 mars), avec François Cluzet et Louise Bourgoin et beaucoup d'invraisemblances ne me fait même pas peur. Dommage. En revanche L'Arnacoeur (sortie le 17 mars) de Pascal Chaureil remplit son contrat (sans plus !) de comédie débridée, avec beaucoup d'invraisemblances là aussi mais c'est fait exprès...

L'histoire de Nénette, la femelle orang-outan du jardin des Plantes m'a ému, racontée par les employés du Muséeum d'histoire naturelle au micro de Nicolas Philibert, le documentariste des espaces clos (Le Pays des sourds, La Moindre des choses, Être et avoir). Autre film sympathique la comédie culinaire Soul kitchen, même si ce n'est pas le genre qui réussit le mieux à Fatih Akin, l'auteur de l'excellent De l'autre côté (mon film préféré de 2007). On rit plutôt de bon coeur aux mésaventures dorsales ou non d'Adam Bousdoukos, même si le film montre une image dégradante de l'administration fiscale allemande...

A ceux que la vie psychique n'a pas épargnés, le mois d'avril offre deux films plutôt dignes : 8 fois debout, une comédie française légèrement satirique sur le marché du travail, avec Julie Gayet et Denis Podalydès, et Greenberg, une anti-comédie romantique qui révèle surtout Greta Gerwig, aux côtés d'une distribution sympathique (Ben Stiller, Rhys Ifans, Jennifer Jason Leigh). "Hurt people hurt people" ("les gens blessés blessent les gens", mais pas toujours). A noter que pour les Américains de Los Angeles, ne pas avoir de voiture est signe selon eux d'une grave tare. No comment...

Dans le style décalé, Benoit Delépine et Gustave Kervern assurent. C'est encore le cas avec Mammuth, leur dernier road-movie auquel se sont prêtés des stars : Gérard Depardieu, Yolande Moreau et Isabelle Adjani, même si la saveur vient parfois des plus brèves apparitions, de Dick Annegarn à Benoît Poelvoorde...

C'est le moment de vous parler d'un week-end un peu spécial consacré à Jan Bucquoy, artiste et cinéaste belge, ami de l'entarteur et créateur du Musée du slip (qui expose les dessous de gens célèbres, dans une visée égalitariste). Au cours des années 1990, il a commencé à réaliser son autobiographie filmée. Cela donne l'iconoclaste et touchant La Vie sexuelle des belges en 1995, suivi par le cultissime Camping Cosmos (la vie sexuelle des belges n°2) en 1997 (mêmes acteurs plus Lolo Ferrari dans ce film néanmoins drôle et intelligent). Ensuite, il quitte le genre fiction pour des essais plus ou moins réussis. J'ai eu un peu de mal avec La Jouissance des hystériques (la vie sexuelle des belges n°4, 2000), qui est une sorte de faux documentaire raté et presque malsain (des choses volées ?) : il est vrai que je l'ai vu dans la foulée des deux premiers épisodes, et je commençais à fatiguer. Beaucoup plus intéressant était en revanche La Société du spectacle et ses conventions (la vie sexuelle des belges n°6, 2002), vu le lendemain, inédit en France et qui donne furieusement envie de relire Guy Debord.

Moi qui ne supporte pas les consensus mous (ni les consensus durs, par exemple sur le dos du peuple grec), je dois avouer que j'ai bien aimé La Vie est belle de Frank Capra. A la fin, c'est le gentil (James Stewart), pourtant au bord du suicide, qui gagne, notamment contre un méchant capitaliste. L'Amérique de l'immédiat après guerre avait provisoirement tiré des leçons de la crise de 29, avant de les oublier, mais c'est une autre histoire...

J'aime énormément Jacques Doillon. Un peu moins son dernier film, Le Mariage à trois (sortie le 21 avril). Formellement, la mise en scène de ce marivaudage à plusieurs est brillante comme à l'accoutumée, mais la condition c'est qu'il faut s'intéresser à ces personnages assez narcissiques, et ça demande un peu / beaucoup d'efforts...

Enfin, je ne vais pas vous laisser sans parler de Dans ses yeux de Juan José Campanella, qui a reçu il y a quelques semaines l'Oscar du meilleur film étranger, et c'est mérité. Un policier qui arrive à la retraite se met à écrire et à se souvenir d'une affaire qui a eu lieu 25 ans plus tôt, et de sa toute jeune supérieure hiérarchique. Un film romanesque (c'est une adaptation) : ambiance, attention à tous les personnages, tout y est. Excellente interprétation, à commencer par Ricardo Darin, déjà excellent dans El aura il y a quelques années. C'est mon film préféré de ce début d'année, et il ne faut pas le manquer !

Si après tout ça vous n'êtes pas repus, je signale que, côtés reprises italiennes, j'ai bien aimé la subversion des Poings dans les poches de Marco Bellocchio (en copie neuve) et le classissisme de Senso de Luchino Visconti, mais j'ai un peu la flemme d'en parler davantage...

Version imprimable | Films de 2010 | Le Dimanche 09/05/2010 | 0 commentaires




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