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Des films de fin 2012

Article évolutif


  • Bravo : Tabou (Miguel Gomes)
  • Bien : Les Invisibles (Sébastien Lifshitz), Ernest et Célestine (Benjamin Renner, Vincent Patar, Stéphane Aubier), J'enrage de son absence (Sandrine Bonnaire), Au-delà des collines (Cristian Mungiu), Augustine (Alice Winocour), Un enfant de toi (Jacques Doillon)
  • Pas mal : Télé Gaucho (Michel Leclerc), Looper (Rian Johnson), Populaire (Régis Roinsard), Le Noir (te) vous va si bien (Jacques Bral), Après Mai (Olivier Assayas)
  • Bof : 4H44, dernier jour sur terre (Abel Ferrara)


TABOU (Miguel Gomes, 5 déc) LLLL
Dans un immeuble de Lisbonne vivent trois femmes : Pilar, retraitée pieuse mais dévouée aux causes humanitaires (Pilar accompagne aussi parfois un homme amoureux d'elle qu'elle n'aime pas), Aurora, sa voisine octogénaire excentrique, et Santa, la femme de ménage noire de celle-ci. Juste avant de mourir, Aurora prononce le nom d'un homme, Ventura, qu'elle a connu au temps de sa jeunesse. Retrouvé, Ventura raconte son histoire avec Aurora dans les années 50-60 au pied du mont Tabou dans une Afrique pas encore décolonisée... C'est l'un des chocs cinématographiques de l'année. Le titre fait référence à Murnau. Mais autant dans le Tabou de Murnau l'histoire d'amour était contrariée en partie par l'avancée de la colonisation, autant la passion évoquée dans ce film, entre deux colons, l'est par les derniers soubresauts de la colonisation (pas montrée sous un jour positif). Tout le film est en noir et blanc, mais différemment dans la seconde partie. Celle-ci est muette dans ses dialogues, mais extrêmement lyrique par la musique des sixties, les bruitages, la voix off très belle du narrateur, le mystérieux crocodile, et réhausse rétrospectivement l'intérêt de la première partie. Miguel Gomes réussit une superbe synthèse entre un retour très premier degré à l'innocence du cinéma des origines, et une sophistication distanciée très moderne.

LES INVISIBLES (Sébastien Lifshitz, 28 nov) LLL
Sébastien Lifshitz a basé son documentaire sur des rencontres avec des personnes homosexuelles, la plupart septuagénaires, voire plus âgées encore. Ce sont des "invisibles", dans la mesure où même les associations LGBT mettent surtout en avant les jeunes. Ces personnes ont été choisies par le réalisateur pour l'aisance avec laquelle ils parlent d'eux-mêmes. Leur parole est d'autant plus précieuse. Dans la diversité de leurs parcours (et de leurs milieux sociologiques), elles et ils reviennent sur leur évolution intime, leurs souffrances, leur combat pour s'accepter et se faire accepter, et leur capacité à aimer, plus forte que tout. Leurs témoignages dépassent cependant le cadre de l'homosexualité, sur deux plans : d'une part ils font revivre soixante ans de société française à travers la question des moeurs, et d'autre part, au présent, ils dessinent ce que peut recéler encore la sexualité et les relations amoureuses à l'heure de la vieillesse.

ERNEST ET CELESTINE (Benjamin Renner, Vincent Patar, Stéphane Aubier, 12 déc) LLL
Ernest est un ours musicien de rue, clodo qui peine à manger à sa faim, dans la ville des ours construite à la surface (avec des emprunts malicieux à la société de consommation : le père d'une famille ours travaille dans un magasin de sucreries, tandis que la mère est vendeuse dans la boutique d'en-face, complémentaire, de dents). En-dessous se trouvent les souris, dont Célestine, élevée dans la crainte du grand méchant ours, mais qui n'y croit guère. Ces deux-là vont se croiser involontairement, et se lier peu à peu d'amitié malgré leurs propres préjugés racistes : Ernest refuse d'abord d'accueillir Célestine sous son toit : "Quand on accueille une souris, il en vient ensuite des milliers d'autres...". Un certain anthropomorphisme est donc convoqué dans cet épatant dessin animé pour dénoncer les travers humains. Le film n'est ni mièvre ni démonstratif, grâce à un humour peut-être dû à Vincent Patar et Stéphane Aubier, les espiègles réalisateurs de Panique au village.

J'ENRAGE DE SON ABSENCE (Sandrine Bonnaire, 31 oct) LLL
Depuis la mort de leur fils qui a mené à leur séparation, Mado a refait sa vie, tandis que Jacques, qui est reparti dans son Amérique natale, ne s'est jamais reconstruit. Lorsque de passage en France, il retrouve Mado, il fait la connaissance du petit Paul, le nouveau fils que Mado a eu avec son nouveau compagnon. Le tout début peut agacer, avec l'interprétation un peu larmoyante de William Hurt (qui joue Jacques). Mais ça bifurque assez vite avec l'étrange relation qui se noue entre Jacques et Paul (on sort du naturalisme). Sandrine Bonnaire réalisatrice sait faire naître une remarquable tension dans ce film, sans explication psychologisante superflue, mais qui bénéficie d'un très bon scénario et d'une interprétation solide (William Hurt finalement, mais aussi Alexandra Lamy, comme un double de Sandrine Bonnaire, et le petit Jalil Mehenni).

AU-DELA DES COLLINES (Cristian Mungiu, 21 nov) LLL
Alina et Voichita étaient inséparables à l'orphelinat. Mais la première, qui est partie un temps travailler en Allemagne, retrouve la seconde dans un monastère très rigoriste où elle semble être devenue très pieuse. C'est une sorte de triangle amoureux qui mélange amour terrestre et amour divin. C'est aussi, comme dans 4 mois, 3 semaines, 2 jours, le précédent film de Mungiu (Palme d'or à Cannes, Au-delà des collines a quant à lui récolté cette année le prix du scénario et un double prix d'interprétation féminine pour ses deux actrices principales, Cristina Flutur et Cosmina Stratan), l'histoire d'une fille qui veut en sauver une autre d'un abus de pouvoir : celui de l'avorteur dans le précédent film, celui du pope et des religieuses dogmatiques (qui croient agir pour le bien) dans celui-ci. Le film est un peu long (2h30), mais rehaussé par la dernière partie, intense.

AUGUSTINE (Alice Winocour, 7 nov) LLL
Paris, 1885. Le célèbre professeur Charcot (Vincent Lindon) se passionne pour une nouvelle patiente, Augustine (Soko), jeune domestique atteinte de crises spectaculaires : on parle de syndrôme "hystérique". Elle devient peu à peu sa malade favorite, qu'il va essayer de guérir par l'hypnose... Comme le titre l'indique, c'est Augustine (et non le professeur Charcot) qui est au centre du film, qui offre plusieurs pistes de lecture : opposition des conditions sociales des deux protagonistes, rapports de domination dans l'exercice de la médecine entre le médecin et sa patiente etc. La plus juste est peut-être le regard féministe : il faut voir Augustine exhibée en pleine crise d'hystérie faire des gestes sexuels devant un parterre de médecins tous masculins... La mise en scène est assez maîtrisée (c'est le premier film d'Alice Winocour), même si elle ne vibre pas autant que Soko, sa formidable interprète principale.

UN ENFANT DE TOI (Jacques Doillon, 26 déc) LLL
Aya (Lou Doillon) reprend contact avec Louis (Samuel Benchetrit), son ex (la rupture a eu lieu 3 ans auparavant), avec qui elle a eu une fille Lina (qui a aujourd'hui 7 ans). Aya est désormais en couple avec Victor (Malik Zidi, toujours excellent), un dentiste, et veut faire un nouvel enfant. Louis sort quant à lui avec Gaëlle, une jeune femme nettement plus jeune que lui... C'est le point de départ du nouveau film de Doillon, qui ôte à ces personnages tout souci pécuniaire (ils ont une situation sociale avantageuse) pour mieux déployer le ballet des rapports compliqués entre eux (les sentiments sont leur souci principal). Les dialogues sont parfois des antiphrases (les mouvements des yeux et des corps disent autre chose que la voix), ça pourra horripiler certains spectateurs (ce n'est pas le film de Doillon par lequel il faut commencer). Mais si on est sensible à sa mise en scène, et malgré quelques longueurs, on goûtera volontiers ce nouvel opus, parfois même assez drôle.

TELE GAUCHO (Michel Leclerc, 12 déc) LL
Après Le Nom des gens, Michel Leclerc raconte une expérience à laquelle il a participé dans les années 90 : une télé parisienne pirate, Télé Bocal, rebaptisée ici Télé Gaucho. L'histoire est celle de ce groupe d'artivistes de la gauche de gauche (puisqu'il existe une gauche de droite), unis par la défense de tous les "sans" de la société et par le rejet des télés commerciales et de leurs émissions racoleuses (dont l'une est animée par une présentatrice qui a les traits d'Emmanuelle Béart, très convaincante). Point commun avec Après Mai d'Olivier Assayas : un jeune homme très cinéphile est happé par la politique. Sauf qu'ici cette dernière n'est pas traitée à la légère. Ambitions de cinéma plus modestes (le scénario est un peu inégal, mais offre à Sara Forestier un nouveau rôle acidulé), mais résultat assez plaisant et assez drôle.

LOOPER (Rian Johnson, 31 oct) LL
Nous sommes en 2044. Joe est un "looper" : il est payé pour flinguer des types que la mafia lui envoie depuis l'année 2074, pour les faire disparaître sans laisser de traces. Jusqu'au jour où il doit éliminer celui qu'il sera devenu trente ans plus tard... Il s'agit d'un film de science-fiction plus que d'anticipation : ce qu'on voit des modes de vie de 2074 ne diffère pas beaucoup des modes de vie actuels (comme si l'Amérique allait être épargnée par le changement climatique et la raréfaction de l'énergie). Politiquement, le totalitarisme est montré comme la responsabilité d'un homme, le "faiseur de pluie" (comme si un système tel que le capitalisme ne pouvait pas se révéler totalitaire). Pour le reste, le scénario est assez inspiré dans l'exploitation d'un paradoxe temporel, et donne du cachet à ce film habile, dans lequel la violence n'est jamais gratuite ni complaisante.

POPULAIRE (Régis Roinsard, 28 nov) LL
Nous sommes en 1958, dans le Calvados. Un jeune patron d'assurances très macho (Romain Duris) engage une secrétaire (Déborah François), gaffeuse mais très rapide pour taper à la machine, même avec deux doigts. Il a l'idée de la présenter à des concours de dactylo. Et de l'entraîner pour ce faire... Le premier plaisir de cette comédie réside dans la reconstitution savoureuse d'une époque (en mode moins cinéphile que Michel Hazanavicius pour les OSS 117). Le mélange assez habile de film sportif, d'une comédie classique basée sur l'association de deux personnalités dissemblables et d'une évolution féministe (ultra-discrète, le point de départ ne l'est pas) fait souvent sourire.

LE NOIR (TE) VOUS VA SI BIEN (Jacques Bral, 5 déc) LL
Jacques Bral est un cinéaste d'origine orientale, auteur de films rares et fauchés. Il raconte ici l'histoire de Cobra, une jeune fille (Sofiia Manousha, jolie révélation) issue de l'immigration, qui se fait draguer au boulot par son patron (Julien Baumgartner), et au café (où chaque matin elle fait étape pour dénouer ses cheveux) par le serveur (Grégoire Leprince-Ringuet). Un drame entre aspiration féministe, racisme latent, et douleur familiale de l'exil. La mise en scène est singulière et sèche (plans parfois très courts, peu de dialogues), mais au service d'un scénario pas toujours à la hauteur.

APRES MAI (Olivier Assayas, 14 nov) LL
Gilles et ses amis, de familles plutôt aisées, ont 16 ou 17 ans en 1971, à l'heure où certaines manifs sont durement réprimées par la police de Raymond Marcellin. Gilles est tenté par la politique et par le cinéma, avec une égale approche un peu romantique de ces deux activités (il reproche à son père, dans l'une des meilleures scènes du film, son filmage conventionnel d'un Maigret pour la télévision). C'est un film d'apprentissage, malheureusement aussi superficiel qu'il est fluide. Au contraire des Amants réguliers de Philippe Garrel, le film ne raconte au fond que l'histoire d'un jeune homme qui se cherche, pas la grande (avec un H) en train de s'écrire...

4H44, DERNIER JOUR SUR TERRE (Abel Ferrara, 19 déc) L
Plusieurs films sortis depuis plus d'un an envisagent une fin brutale de la vie humaine sur Terre. Cela donne Melancholia, le chef d'oeuvre grinçant, sidéral et sidérant de Lars Von Trier, ou Jusqu'à ce que la fin du monde nous sépare, vision plus romantique (et hollywoodienne). Abel Ferrara nous livre sa version, arty et new-yorkaise. Un couple de bobos vit ses dernières heures avant la fin du monde, lui surfe sur Internet, contacte une dernière fois ses proches sur Skype, elle peint sa dernière toile, ensemble ils dansent et s'enlacent une dernière fois. Artificiel, vain et prétentieux.
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Mon Top 15 de 2012


1. Holy motors (Leos Carax, France)
2. Tabou (Miguel Gomes, Portugal)
3. Margin call (J.C. Chandor, Etats-Unis)
4. Camille redouble (Noémie Lvovsky, France)
5. Louise Wimmer (Cyril Mennegun, France)
6. Amour (Michael Haneke, France)
7. Take shelter (Jeff Nichols, Etats-Unis)
8. Sport de filles (Patricia Mazuy, France)
9. The Day he arrives (Hong Sang-soo, Corée du Sud)
10. Le Grand soir (Benoit Delépine, Gustave Kervern, France/Belgique)
11. Les Enfants loups, Ame & Youki (Mamoru Hosoda, Japon)
12. Les Invisibles (Sébastien Lifshitz, France)
13. Pour lui (Andreas Dresen, Allemagne)
14. Adieu Berthe (Bruno Podalydès, France)
15. Después de Lucia (Michel Franco, Mexique)

Viennent ensuite A l'ombre de la République (Stéphane Mercurio, France), Réussir sa vie (Benoit Forgeard, France), Martha Marcy May Marlene (Sean Durkin, Etats-Unis), Bullhead (Michaël R. Roskam, Belgique), De rouille et d'os (Jacques Audiard, France), Trois soeurs (Milagros Mumenthaler, Argentine), The We and the I (Michel Gondry, Etats-Unis), A perdre la raison (Joachim Lafosse, France/Belgique), Vous n'avez encore rien vu (Alain Resnais, France), Ernest et Célestine (Benjamin Renner, Vincent Patar, Stéphane Aubier, France/Belgique), J'enrage de son absence (Sandrine Bonnaire, France), L'Enfant d'en haut (Ursula Meier, Suisse/France), César doit mourir (Paolo et Vittorio Taviani, Italie), Les Adieux à la reine (Benoit Jacquot, France), Les Nouveaux chiens de garde (Gilles Balbastre, Yannick Kergoat, France) etc...


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Des films de 2012 (suite)

  • Bien : Camille redouble (Noémie Lvovsky), Amour (Michael Haneke), Les Enfants loups, Ame & Youki (Mamoru Hosoda), Después de Lucia (Michel Franco), The We and the I (Michel Gondry),  A perdre la raison (Joachim Lafosse), Vous n'avez encore rien vu (Alain Resnais), César doit mourir (Paolo et Vittorio Taviani), In another country (Hong Sang-soo), Du vent dans mes mollets (Carine Tardieu), Une éducation norvégienne (Jens Lien), Associés contre le crime (Pascal Thomas), Jusqu'à ce que la fin du monde nous sépare (Lorene Scafaria)
  • Pas mal : Dans la maison (François Ozon), Wrong (Quentin Dupieux), Terri (Azazel Jacobs), Ted (Seth MacFarlane), Rebelle (Mark Andrews, Brenda Chapman, Steve Purcell), Quelques heures de printemps (Stéphane Brizé), Cherchez Hortense (Pascal Bonitzer), Guilty of romance (Sono Sion), Les Mouvements du bassin (HPG), Le Magasin des suicides (Patrice Leconte)
  • Bof : Au galop (Louis-Do de Lencquesaing)

CAMILLE REDOUBLE (Noémie Lvovsky, 12 sep) LLL
Fin décembre 2008. Camille a bientôt 40 ans, boit beaucoup et se fait larguer par l'homme de sa vie. Le soir du réveillon, elle s'évanouit et se réveille le 1er janvier 1985, à l'hôpital. Elle a 16 ans, vient de faire une tentative de suicide, et ses parents sont toujours vivants... Si l'époque est discrètement reconstituée, le film n'en fait pas trop dans le réalisme : la cinéaste et actrice principale (formidable Noémie Lvovsky) n'abuse pas de maquillage pour se forcer à ressembler physiquement à une adolescente. Les vêtements et les situations suffisent pour qu'on marche. Question de mise en scène. Et si nous étions projetés dans le passé, que voudrions-nous et que pourrions-nous changer ? En toute simplicité apparente, cette belle comédie donne des éléments de réponse subtiles...

AMOUR (Michael Haneke, 24 oct) LLL
Georges et Anne, anciens professeurs de musique octogénaires, vivent ensemble depuis des décennies. Puis un jour Anne a une attaque cérébrale, et l'opération qui suit ne se passe pas bien... Au début, le brio des premières scènes (tel le plan-séquence du début d'un récital de piano, où la caméra ne scrute que les spectateurs, au milieu desquels Georges et Anne, et jamais la scène) laisse redouter une mise en scène surplombante, comme dans Le Ruban blanc, précédent film du cinéaste. Par la suite rarement on aura aussi bien senti l'agencement de l'appartement, lieu quasi unique du film. Et pourtant on oublie assez vite cette maîtrise formelle pour être en empathie, ce qui est rare chez Haneke, avec les deux personnages principaux (Jean-Louis Trintignant et Emmanuelle Riva), immenses dans le rétrécissement apparent de leurs vies. Ce sont les convenances sociales portées par d'autres personnages, notamment leur fille (Isabelle Huppert), qui sont montrées de manière plus grinçante, mais sans manichéisme.

LES ENFANTS LOUPS, AME & YOUKI (Mamoru Hosoda, 29 aou) LLL
Anna est une étudiante qui fait des petits boulots pour payer ses études à l'université. Là-bas, elle tombe amoureuse d'un mystérieux garçon, très différent des autres. Elle découvrira son secret : c'est un homme-loup. Ensemble, ils vont avoir deux bébés, Youki, l'aînée, et Ame le benjamin. Alors que le père disparaît tragiquement, Anna se pose des questions : comment élever des enfants qui peuvent se transformer à loisir en loup ? Voudront-ils devenir des êtres humains ou des loups ? Conte initiatique, réflexion sur l'éducation, sur nos rapports avec la nature : Mamoru Hosoda, signe un excellent film d'animation, très beau visuellement même si assez différent des productions du studio Ghibli.

DESPUES DE LUCIA (Michel Franco, 3 oct) LLL
Un père et sa fille de 15 ans, Alejandra, déménagent et s'installent près de Mexico. On comprend assez vite que Lucia, la mère, a été tuée dans un accident de la route quelques temps auparavant. Si le père tente de reprendre son activité professionnelle de chef cuisinier, tout en restant assez déprimé, Alejandra, plus souriante, semble mieux résister et intègre un nouveau lycée. Jusqu'au jour où une bande de camarades friqués l'emmène en week-end... La progression du film est imprévisible. Et même si la fin est moralement discutable, la mise en scène, faite de plans séquences rigoureux et d'ellipses, est implacable et tient en haleine.

THE WE AND THE I (Michel Gondry, 12 sep) LLL
C'est la fin de l'année. Les élèves d'un lycée du Bronx grimpent dans le bus pour un dernier trajet ensemble avant l'été. Nouveau film de Michel Gondry, en mode indépendant, après avoir réalisé un film de commande hollywoodien (The Green hornet). Le générique fait penser à une déclinaison de Soyez sympas, rembobinez avec la maquette de bus. Mais ensuite on est en terrain inconnu, avec ces interprètes débutants ou non professionnels (issus du Bronx). Au fur et à mesure des dessertes du bus, belle progression du groupe large (avec ses caïds) aux conversations d'égale à égale entre individus.

A PERDRE LA RAISON (Joachim Lafosse, 22 aou) LLL
Quatre petits cercueils sont embarqués dans un avion. Une jeune femme déprimée est en observation à l'hôpital. Que s'est-il passé ? Même si on le devine à cet instant, le film nous le fait oublier en remontant au début de l'histoire. Cette jeune femme, Murielle (Emilie Dequenne, dans sa plus impressionnante composition depuis Rosetta), rencontre Mounir (Tahar Rahim). Ils s'aiment éperdument, décident de se marier. Mais unissent également leur destin au docteur Pinget (Niels Arestrup), le père adoptif de Mounir. Le film décrit des liens pervers et l'évolution de Murielle, qui passe progressivement d'un état radieux à une sorte de dépression (ne pas manquer la scène où elle chante Femmes je vous aime dans sa voiture). Une belle réussite jamais démonstrative.

VOUS N'AVEZ ENCORE RIEN VU (Alain Resnais, 26 sep) LLL
Une kyrielle d'actrices et acteurs connus (Sabine Azéma, Pierre Arditi, Anne Consigny, Lambert Wilson, Anny Duperey, Michel Piccoli) apprennent la mort d'un auteur dramatique, et sont conviés dans sa résidence secondaire. Ils sont invités à visionner une captation d'une jeune troupe qui reprend "Eurydice", l'une des pièces du disparu que tou-te-s ont joué par le passé... Si l'ouverture du film, très solennelle, fait peur, la suite est délectable, et on se prend au jeu. Célébration de l'amour qui défie la mort et le temps, ode aux grands interprètes, à l'artifice du théâtre et du cinéma (qui ici se marient bien). Beau testament de Resnais, avec son film le plus vif depuis On connaît la chanson.

CESAR DOIT MOURIR (Paolo et Vittorio Taviani, 17 oct) LLL
Dans la prison centrale de Rebibbia, près de Rome, des détenus du quartier de haute sécurité répètent puis jouent le Jules César de Shakespeare. Tout est vrai ou presque : les détenus sont vraiment des condamnés à de longues peines (pour trafic de stupéfiants, association mafieuse, voire homicide). Mais le film n'est pas tout à fait un documentaire : on voit bien que les cadrages millimétrés sont trop beaux pour être improvisés. Mais quelle que soit la frontière avec la réalité, l'expérience produit son effet : ces anciens criminels, à travers la pièce, se réapproprient la question du mal et du châtiment, et en même temps s'évadent par le jeu. Mais ce film court (1h15) laisse également le spectateur libre de son interprétation.

IN ANOTHER COUNTRY (Hong Sang-soo, 17 oct) LLL
Une jeune femme écrit trois court-métrages, avec pour constante une femme française (respectivement : cinéaste / épouse infidèle d'un industriel / femme abandonnée, mais à chaque fois jouée par Isabelle Huppert) qui passe quelques jours à Mohang (station balnéaire de Corée du Sud) hors saison. Il y a bien d'autres points communs ou correspondances (notamment les personnages qu'elle rencontre) entre les trois parties de ce film ludique, qui peut faire penser au Resnais de Smoking/No smoking ou au Melinda et Melinda de Woody Allen. Mais l'intérêt du film ne se limite pas à sa brillante construction toute en variations, personnages ou situations émeuvent indépendamment de cela, avec les ingrédients de toujours chez ce cinéaste : jeu de séduction et rasades de soju...

DU VENT DANS MES MOLLETS (Carine Tardieu, 22 aou) LLL
L'action se passe au début des années 80. Rachel a 9 ans, mais est confrontée à l'angoisse diffuse des adultes, à commencer par celles de ses parents : sa mère (Agnès Jaoui) est plus ou moins cantonnée à la cuisine, et son père (Denis Podalydès), qui en installe (des cuisines), semble en plein doute, ce qui touche Catherine (Isabelle Carré), mère divorcée de Valérie, la meilleure amie (délurée) de Rachel. Avec un sous-texte parfois grave, Carine Tardieu réussit une comédie-collage pleine de ruptures de ton (quitte à abuser des bons mots d'enfant) et de trouvailles malicieuses ou grinçantes, et confirme la singularité que La Tête de maman, son premier film, laissait déjà entrevoir.

UNE EDUCATION NORVEGIENNE (Jens Lien, 6 juin) LLL
Nous sommes à la fin des années 70. Nikolaj a 14 ans et se demande comment s'affirmer, face à des parents très permissifs, hippies et joyeusement anticapitalistes. Il découvre les punks, alors que sa mère meurt accidentellement et que son père déprime... C'est un conte initiatique tiré de l'autobiographie du scénariste (Nikolaj Frobenius). La Norvège n'est pas le sujet du film, qui croise plusieurs thèmes : comment élever ses enfants quand on est militant, le travail de deuil, l'adolescence comme sas entre l'enfance et l'âge adulte, la nécessité de se rebeller à tout âge contre l'ordre établi. La mise en scène n'est jamais moralisatrice ni démonstrative, Jens Lien développant un humour pince-sans-rire qui laisse au spectateur sa liberté...

ASSOCIES CONTRE LE CRIME (Pascal Thomas, 22 aou) LLL
Pour la troisième fois à l'écran, le couple Beresford (Catherine Frot et André Dussolier, impeccables) imaginé par Agatha Christie reprend du service. Ils étaient pourtant bien décidés à prendre leur retraite. Mais une héritière russe disparaît, ainsi qu'un savant qui officiait dans une clinique de chirurgie esthétique et qui semble avoir découvert le secret de l'éternelle jeunesse... L'intrigue est un prétexte pour une nouvelle fantaisie policière, certes mineure, mais pleine de digressions délicieuses, d'humour et de douce ironie...

JUSQU'A CE QUE LA FIN DU MONDE NOUS SEPARE (Lorene Scafaria, 8 aou) LLL
Un astéroïde va s'écraser dans trois semaines sur la Terre, détruisant la vie humaine. Le point de départ rappelle évidemment Melancholia, le chef d'oeuvre de Lars Von Trier (à condition de le lire au premier degré), sorti l'an dernier. Mais le cinéaste danois en faisait une tragédie familiale dans une demeure retirée du reste du monde, alors que Lorene Scafaria traite le sujet différemment. C'est un road movie, qui permet de donner à voir tout un éventail de réactions à cette situation singulière. Mais c'est aussi une sorte de comédie dramatique romantique qui s'emploie à rapprocher deux êtres (Steve Carell et Keira Knightley, surprenants en bien) une dernière fois.

DANS LA MAISON (François Ozon, 10 oct) LL
Germain (Fabrice Luchini) est un prof de français blasé. Jusqu'au jour où, ayant demandé à ses élèves une rédaction sur leur week-end, l'un d'entre eux raconte comment il s'est introduit dans la maison d'un de ses camarades. La rédaction se termine par ses mots : "à suivre". Le professeur l'encourage à continuer à écrire... C'est le début du nouvel exercice de style de François Ozon, qui surprend toujours (la constante étant qu'avec lui ça grince toujours quelque part !). Formellement c'est brillant (sur le statut des images, sur le voyeurisme), mais presque trop, au risque que le spectateur ne se laisse pas prendre au jeu et finisse par trouver ça un peu vain...

WRONG (Quentin Dupieux, 5 sep) LL
Un matin, au réveil (à 7h60 !), Dolph réalise qu'il a perdu son chien Paul... C'est le début d'une comédie absurde, qui multiplie les étrangetés. Dans ses meilleurs moments, on pense à l'univers de David Lynch auquel on aurait insufflé de l'humour. Cependant, on peut aussi y voir beaucoup de petites idées un peu inégales mises bout à bout. Aussi, s'il vaut le détour et possède un caractère culte indéniable, il n'égale pas la puissance de Rubber, le précédent film du cinéaste, sorti il y a deux ans, un film très cinéphile, absurde mais très construit, sur un pneu télépathe et serial killer...

TERRI (Azazel Jacobs, 8 aou) LL
Terri (Jacob Wysocki, révélation) est un lycéen obèse qui finit par ne plus quitter son pyjama (c'est plus confortable). Il vit avec un oncle souffrant dont il s'occupe. Moqué par ses camarades (plus immatures que lui), il retient l'attention du proviseur (John C. Reilly, excellent), étonnamment disponible et qui le prend sous son aile. C'est un conte : les situations ne sont pas forcément réalistes, mais les personnages si. Même si tout n'est pas réussi, c'est un joli film, à la fois fable initiatique et essai sur la différence et la dignité humaine.

TED (Seth MacFarlane, 10 oct) LL
John (Mark Wahlberg) est un trentenaire américain qui vit une sorte de ménage à trois, avec sa copine (Mila Kunis) et son nounours Ted, que ses parents lui ont offert dans les années 80, alors que John était rejeté par les gamins du quartier. Mais Ted est un peu spécial, il est parlant, et même bien vivant : au fil du temps il est devenu un véritable obsédé sexuel... Le film commence fort, se veut presque dialectique entre régression et transgression... Mais même le mauvais esprit demande une finesse qui n'est pas toujours présente ici, d'où des longueurs, un peu dissipées dans la dernière partie.

REBELLE (Mark Andrews, Brenda Chapman, Steve Purcell, 1er aou) LL
La rebelle du titre de ce film d'animation (coproduction Disney-Pixar) est une adolescente promise au destin de princesse, et qui veut s'émanciper de cet avenir passif (accueillir favorablement un prétendant et devenir l'épouse soumise du prince). Elle est d'ailleurs douée pour les prouesses supposées de garçon (chevauchées, tir à l'arc). L'argument du film est féministe, son traitement est moins subversif, en deçà des films de Miyazaki, et visuellement c'est un peu plus convenu que les grandes réussites de Pixar.

QUELQUES HEURES DE PRINTEMPS (Stéphane Brizé, 19 sep) LL
Alain (Vincent Lindon), proche de la cinquantaine, sort de prison et est contraint de retourner vivre chez sa mère (Hélène Vincent), une femme rugueuse condamnée par la maladie et qui entreprend auprès d'une association suisse une démarche de suicide assisté... Le sujet est très casse-gueule, surtout réalisé par Stéphane Brizé, dont je n'avais pas aimé Mademoiselle Chambon. Et pourtant, le résultat est plutôt bien tenu, grâce à une mise en scène épurée, aux talents des deux interprètes principaux, ainsi qu'à la chaleur insufflée par les seconds rôles (Emmanuelle Seigner, Olivier Perrier).

CHERCHEZ HORTENSE (Pascal Bonitzer, 5 sep) LL
Un professeur de civilisation chinoise (Jean-Pierre Bacri) est chargé par sa femme (Kristin Scott Thomas), metteuse en scène de théâtre tentée par l'adultère, d'intervenir auprès de son père (Claude Rich), haut fonctionnaire, pour éviter l'expulsion d'une jeune sans-papier. Il rencontre une jeune femme mystérieuse (Isabelle Carré)... Comme dans la plupart de ses films, Pascal Bonitzer souligne les petites lâchetés ordinaires de son personnage principal masculin. Sans atteindre le peps de ses premiers films (Encore, Rien sur Robert), il retrouve un peu d'inspiration aux côtés de ses interprètes tous excellents.

GUILTY OF ROMANCE (Sono Sion, 25 juil) LL
La vie d'Izumi est bien fade : son mari écrit des romans d'amour à succès, mais ne la touche plus. Rongée par le désir, elle se met à poser nue, puis va se prostituer dans les "love hotels" de Shibuya, le quartier chaud de Tokyo, encouragée par une professeur d'université schizophrène. Et ça ne va pas forcément bien finir... C'est une sorte de thriller érotique, un exercice de style assez réussi et assez inconfortable, avec une héroïne au parcours ambigu, entre émancipation et déchéance.

LES MOUVEMENTS DU BASSIN (HPG, 26 sep) LL
HPG est un acteur-réalisateur de films X, mais il s'essaie de temps en temps comme ici à des films "normaux". Normal ce film-ci ? Pas vraiment. On y suit les trajectoires de deux personnages principaux : Hervé (HPG), viré du zoo où il travaille car il déprime les animaux, et Marion (Rachida Brakni) une lesbienne prête à tout pour avoir un enfant. Marion surmonte tous les obstacles, tandis que Hervé, un peu bas du front se marginalise. Inégal, le film est à la limite du glauque, mais empreint de sincérité.

LE MAGASIN DES SUICIDES (Patrice Leconte, 26 sep) LL
Nous sommes dans une ville où tout le monde a le bourdon, et où le commerce le plus florissant est une boutique où l'on vend des accessoires pour se suicider. Jusqu'au jour où la patronne accouche d'un enfant qui est la joie de vivre incarnée... Le point de départ du premier film d'animation de Patrice Leconte est très bon. Le résultat à l'arrivée est plus mitigé (n'est pas Tim Burton qui veut), manque de profondeur. Des chansons envahissantes, comme dans certains films pour enfants (pour quel public a-t-il fait le film ?). Résultat néanmoins sympathique, avec une bonne dose d'humour noir.

AU GALOP (Louis-Do de Lencquesaing, 17 oct) L
Louis-Do de Lencquesaing et sa fille sont d'excellents interprètes, notamment dans Le Père de mes enfants (Mia Hansen-Love), où ils étaient père et fille à l'écran. C'est encore le cas ici, dans cette histoire d'un écrivain divorcé qui vit avec sa fille étudiante, et qui est confronté à la fois à la mort de son père et à la naissance d'un nouvel amour (avec Valentina Cervi, qu'on retrouve avec plaisir). Le problème n'est pas dans le sujet ni dans l'interprétation, mais dans l'absence totale d'inspiration cinématographique (pas de mise en scène, montage approximatif).

Version imprimable | Films de 2012 | Le Mardi 06/11/2012 | 0 commentaires
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Suite des films de 2012

  • Bravo : Holy motors (Leos Carax)
  • Bien : The Day he arrives (Hong Sang-soo), Le Grand soir (Benoit Delépine, Gustave Kervern), Adieu Berthe (Bruno Podalydès), De rouille et d'os (Jacques Audiard), Trois soeurs (Milagros Mumenthaler), The Deep blue sea (Terence Davies), Chercher le garçon (Dorothée Sebbagh)
  • Pas mal : Summertime (Matthew Gordon), Moonrise kingdom (Wes Anderson), Mains armées (Pierre Jolivet), La Petite Venise (Andrea Segre), Sur la route (Walter Salles), Il n'y a pas de rapport sexuel (Raphaël Siboni)
  • Bof : Laurence anyways (Xavier Dolan), To Rome with love (Woody Allen)

HOLY MOTORS (Leos Carax, 4 juil) LLLL
Quelques heures dans l'existence de Monsieur Oscar, qui voyage de vie en vie. Tour à tour homme d'affaires, mendiante, créature monstrueuse, père de famille, vieillard, il joue une multitude de rôles, mais sans caméras apparentes, ni public averti. Il est uniquement accompagné de Céline, qui le conduit de rendez-vous en rendez-vous dans une immense limousine blanche qui lui sert de loge... Pas facile de décrire le nouveau film de Leos Carax, ni même une seule scène (même si c'est tentant : il y a des morceaux d'anthologie). L'exercice serait aussi vain que de paraphraser de la poésie. Car il s'agit bien d'un poème visuel, parfois assez trash, du cinéma total, dont les influences vont de Feuillade à Weerasethakul en passant par Franju et Lynch. Un hommage aux comédiens en général et à Denis Lavant en particulier. Une ode à la vie, qui nous impose plusieurs rôles simultanés. Peu importe qu'on n'y aime pas forcément tout, ce qui compte c'est "la beauté du geste"...

THE DAY HE ARRIVES (Hong Sang-soo, 16 mai) LLL
Seong-jun, professeur de province autrefois cinéaste, revient passer quelques jours à Séoul avec un vieil ami. Au passage il retrouve une ex le temps d'une nuit... Du Hong Sang-soo pur jus. C'est d'ailleurs en sa qualité de cinéaste obsessionnel qu'il est qualifié par des critiques français paresseux de Rohmer sud-coréen. Car dans ses films on boit et on couche plus que chez Rohmer... Si ce film-ci est l'un de ses plus beaux des dernières années  - il faut remonter à 2005 (Conte de cinéma) pour en retrouver un aussi réussi -, c'est dû à la qualité existentielle de cette chronique amoureuse, à l'apparente simplicité du dispositif derrière laquelle se cache de subtiles répétitions, au superbe noir et blanc, à la neige qui tombe à petits flocons...

LE GRAND SOIR (Benoit Delépine, Gustave Kervern, 6 juin) LLL
Deux frères aux antipodes l'un de l'autre : Not (Benoît Poelvoorde) est le plus vieux punk à chien d'Europe, Jean-Pierre (Albert Dupontel) est représentant en matelas. Quant à leurs parents (Areski Belkacem et surtout Brigitte Fontaine, irrésistible), ils tiennent une Pataterie. Un jour, Jean-Pierre est licencié... Les réalisateurs, avec leur humour très noir et très politique, réussissent une comédie très corrosive sur le capitalisme et la société de consommation. Il n'y a qu'à voir de quelle façon ils filment la zone commerciale dans laquelle se passe l'essentiel du film. Aucun compromis dans la mise en scène, audacieuse dans chaque plan. Résultat à la fois désespéré et revigorant.

ADIEU BERTHE (Bruno Podalydès, 20 juin) LLL
Armand (Denis Podalydès), pharmacien, est à l'heure des choix. Il s'apprête à quitter sa femme (Isabelle Candelier) pour sa maîtresse (Valérie Lemercier), et doit choisir l'entreprise de pompes funèbres ("Définitif" ou "Obsécool") qui enterrera Mémé, sa grand-mère un peu oubliée qui vient de décéder. Parallèlement, il prépare un tour de magie pour l'anniversaire de la fille de sa maîtresse... Sur le papier, c'est déjà loufoque, sur l'écran c'est très drôle. Certains thèmes des précédents films du réalisateur sont retricotés (indécision masculine, magie), mais il y a du nouveau dans leur humour : des croque-morts concurrents désopilants (Michel Vuillermoz, Bruno Podalydès), des personnages féminins non sacrifiés, et une utilisation réjouissante de musiques classiques.

DE ROUILLE ET D'OS (Jacques Audiard, 17 mai) LLL
Un père de famille boxeur qui vit de petits trafics ou de petits boulots (videur de boîte, agent de sécurité) rencontre une jeune femme qui dresse des orques dans un Marineland. Celle-ci va avoir un terrible accident... Le point fort n'est pas le sujet en lui-même mais son traitement. Matthias Schoenaerts (la révélation de Bullhead) et Marion Cotillard construisent admirablement les deux éclopés du film (elle, handicapée physique et lui, handicapé moral et oral). Et Jacques Audiard filme sans faux fuyants (et bénéficie d'excellents effets spéciaux).

TROIS SOEURS (Milagros Mumenthaler, 18 juil) LLL
Buenos Aires, en été. Trois soeurs, Marina, Sofia et Violeta se retrouvent dans la maison familiale alors que leur grand mère qui les a élevées (on comprend qu'elles ont perdu leurs parents depuis longtemps), vient de mourir. Marina, l'aînée, plus responsable, se concentre sur ses études et l'intendance du foyer, Sofia est obnubilée par ses tenues (qu'elle refuse jalousement de prêter à ses soeurs) et Violeta, la dernière, se traîne du lit au canapé et reçoit de temps à autre un garçon. Les mois passent et la situation évolue... La réalisatrice, dont c'est le premier long métrage, parvient à rendre passionnantes les trajectoires esquissées par ses héroïnes, grâce à une caméra qui les ausculte tout en faisant parler le lieu unique (la maison et son jardin).

THE DEEP BLUE SEA (Terence Davies, 20 juin) LLL
Dans les années 50 à Londres, Hester (Rachel Weisz, splendide), l'épouse d'un haut magistrat quitte son confort pour vivre sa passion avec un ancien pilote de l'air (durant la Seconde guerre mondiale). Pour elle c'est une véritable passion, qu'en est-il pour lui ? C'est un mélodrame qui se joue, mais il n'est pas flamboyant comme chez Sirk, Minnelli, Ozon ou Almodovar. Il est tourné en lumière froide (qui peut décontenancer au début, mais on s'y fait), ravagé de l'intérieur, et fait plutôt songer, sur la forme (car l'histoire n'a rien à voir), à Saraband, le dernier Bergman...

CHERCHER LE GARçON (Dorothée Sebbagh, 9 mai) LLL
Suite à une résolution de début d'année, Emilie, 35 ans (jouée par Sophie Cattani, qui interprétait la mère de Tomboy), s'inscrit sur le site Meet me pour trouver l'amour... Elle rencontre des garçons, assez différents les uns des autres. Certains sont à la limite de la caricature, mais les situations et le regard posé sur eux par la cinéaste ne sont jamais caricaturaux. Et Emilie évolue au fil des rencontres (qui peuvent être simplement amicales). Un joli film court (1h10), assez ouvert, et tourné en décors naturels près de Marseille...

SUMMERTIME (Matthew Gordon, 4 juil) LL
Abandonné par sa mère, plus ou moins dépressive, Robbie, 14 ans, veille sur son petit demi-frère et sa grand-mère, dans un coin paumé du Mississipi. Robbie a encore l'âge de jouer avec son petit frère dans les champs environnants, mais juste avant les vacances d'été il a été surpris par le principal en train de chaparder dans les casiers du collège. Et une fois son grand frère revenu, il est le plus adulte de tous et rêve d'un rétablissement de la cellule familiale (et d'un retour de la mère)... Ce premier film modeste s'attache à des exclus du rêve américain, et touche plutôt juste.

MOONRISE KINGDOM (Wes Anderson, 16 mai) LL
Sur une île au large de la Nouvelle-Angleterre, dans les années 60, deux enfants de douze ans, un scout orphelin rejeté par ses camarades et une fille de bonne famille fuguent. Très débrouillards, ils emmènent une batterie d'accessoires, dont le 45 tours de Françoise Hardy Le Temps de l'amour (ce qui nous vaut une très belle scène cocasse). Si l'on ajoute le branle-bas de combat déclenché par cette fugue chez les adultes, personnages secondaires intéressants joués par des stars (Bill Murray, Frances McDormand, Bruce Willis, Edward Norton), tout cela crée un univers drolatique et mélancolique, et un poil étouffant dans l'ajustement des détails.

MAINS ARMEES (Pierre Jolivet, 11 juil) LL
Lucas (Roschdy Zem) est flic à Marseille, sans avoir eu la vocation très jeune (auparavant il a été prof de maths). En remontant une filière de trafic d'armes international, lui et son équipe débarquent à Paris, où travaille Maya (Leïla Bekhti). Maya est flic elle aussi, mais dans une brigade des stups, et est la fille de Lucas, même si elle l'a à peine connu (il a quitté sa mère avant sa naissance). Tout en menant son enquête, Lucas tente de revoir Maya... Sans révolutionner le genre, Pierre Jolivert a réalisé un bon polar (bonnes ambiances, bonnes interprétations).

LA PETITE VENISE (Andrea Segre, 13 juin) LL
Une jeune immigrée chinoise (Zhao Tao) arrive à Choggia, une bourgade de la lagune vénitienne. Elle y travaille dans un café, en attendant de faire venir son fils, et se lie d'amitié avec un vieux pêcheur (Rade Serbedzija, une nature), ce qui ne plaît pas à tout le monde... Au début, on a peur de voir un film un peu chromo, un peu cliché aussi, mais cette crainte se dissipe assez vite, car au fur et à mesure le film gagne en épaisseur. Une jolie petite réussite.

SUR LA ROUTE (Walter Salles, 23 mai) LL
Je précise : je n'ai pas lu le livre de Jack Kerouac, roman culte de la Beat generation. Alors voilà, les personnages sont très bien : de Sal le narrateur à ses rencontres (Marylou, le charismatique Dean...). Ils sont très bien interprétés (Sam Riley, Kristen Stewart, Garrett Hedlund). Mais la mise en scène de Walter Salles (le réalisateur de Carnets de voyage, qui s'y connaît en road movie) est très sage, faisant de l'histoire un long récit initiatique dénué de toute transgression (ou presque).

IL N'Y A PAS DE RAPPORT SEXUEL (Raphaël Siboni, 11 jan) LL
Raphaël Siboni est plutôt dans l'art contemporain, et à partir des milliers d'heures de making-of de l'acteur et réalisateur de films pornos HPG, il réalise un documentaire sur le X. Certains détails font sourire (trucages, bruitage), sinon on se rend compte que les acteurs et actrices ne peuvent pas prendre réellement du plaisir (interruptions, positions non naturelles). Bref, cela (et la chair triste) donne une tonalité presque mélancolique et énigmatique (comment les gens en viennent à rejoindre ce milieu là ?).

LAURENCE ANYWAYS (Xavier Dolan, 18 juil) L
Au tout début des années 90, Laurence, un jeune professeur de lettres, décide de devenir une femme. Comment va-t-il traverser les épreuves ? Comment vont réagir ses proches, et surtout Fred, sa compagne ? L'histoire est passionnante, et Xavier Dolan est le réalisateur très jeune et très doué des Amours imaginaires. Malheureusement, sa mise en scène est grandiloquente (le film donne l'aspect d'un clip de 2h30, impression renforcée par l'omniprésence de la musique) et dessert le sujet. Dommage car les interprètes (Melvil Poupaud, Suzanne Clément) font preuve de beaucoup de conviction.

TO ROME WITH LOVE (Woody Allen, 4 juil) L
Woody Allen fait très souvent des films réussis, et souvent des films très réussis. En ce sens, celui-ci est exceptionnel dans le sens où c'est un ratage dans les grandes largeurs. Plusieurs sketchs sont entremêlés (sans interférer). On sauvera le personnage du chanteur d'opéra sous la douche et l'interprétation d'Ellen Page (qui montre qu'elle est une actrice allenienne). Pour le reste, rien ne fonctionne, et deux ans après le sublime Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu, c'est une belle dégringolade. Vivement la remontée !

Version imprimable | Films de 2012 | Le Lundi 30/07/2012 | 0 commentaires
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Suite des films de début 2012

  • Bien : Margin Call (J.C. Chandor), Pour lui (Andreas Dresen), A l'ombre de la République (Stéphane Mercurio), Réussir sa vie (Benoît Forgeard), Martha Marcy May Marlene (Sean Durkin), Bullhead (Michaël R. Roskam), L'Enfant d'en haut (Ursula Meier), Les Adieux à la reine (Benoît Jacquot), Elena (Andreï Zviaguintsev), Tue-moi (Emily Atef), Aloïs Nebel (Tomas Lunak)
  • Pas mal : Radiostars (Romain Levy), 38 témoins (Lucas Belvaux), Bovines (Emmanuel Gras), I wish (Hirokazu Kore-Eda), Perfect sense (David MacKenzie), Cloclo (Florent Emilio Siri)
  • Bof : Nouveau départ (Cameron Crowe), Chroniques sexuelles d'une famille d'aujourd'hui (Jean-Marc Barr, Pascal Arnold), Sur la planche (Leïla Kilani), L'Hiver dernier (John Shank), La Vida util (Federico Veiroj), Chronicle (Josh Trank)

MARGIN CALL (J.C. Chandor, 2 mai) LLL
On est en 2008, au coeur d'une banque d'affaires de Wall Street. L'entreprise a dépassé plusieurs fois depuis quinze jours les limites historiques de l'indice de volatilité. En clair, le risque est énorme. C'est un jeune analyste financier qui le découvre, à la suite d'un travail de son supérieur hiérarchique, licencié la veille (compression de personnel pour faire monter le cours boursier)... Unité de temps (48h, y compris la nuit), de lieu et d'action. Nous sommes au coeur du capitalisme financier. Le film montre bien, dès les premières scènes, l'inhumanité du management d'aujourd'hui, puis l'absurdité du système lui-même, et enfin les réflexes cyniques des financiers quand la catastrophe pointe. A ce titre, cette remarquable première oeuvre est un grand film de personnages, baignant tous dans le cynisme mais à des degrés divers, ce qui nous vaut des rapports entre eux passionnants. Le casting (Kevin Spacey, Jeremy Irons, Demi Moore, mais il faudrait citer aussi Zachary Quinto, Paul Bettany ou Stanley Tucci) est également pour beaucoup dans la réussite du film.

POUR LUI
(Andreas Dresen, 4 avr) LLL
Un homme dans la quarantaine, marié et père d'une adolescente de 14 ans et d'un jeune garçon de 8 ans, apprend qu'il est atteint d'une tumeur au cerveau et qu'il ne lui reste plus que quelques mois à vivre. C'est le début de ce film qui ne verse ni dans l'émotion facile ni dans une stylisation qui se mettrait à distance de son sujet. Au contraire, c'est une sorte d'hyperréalisme qui domine (tous les interprètes sont excellents), avec ses moments grinçants et ses sentiments paradoxaux, avec parfois quelques échappées oniriques pleines de dérision. Comme dans Septième ciel, son précédent film, sur la sexualité des personnes (très) âgées, Andreas Dresen fait preuve d'un regard humaniste et réussit un grand film, d'ailleurs récompensé du prix de la sélection Un certain regard au festival de Cannes 2011.

A L'OMBRE DE LA REPUBLIQUE (Stéphane Mercurio, 7 mar) LLL
Quatre ans après A côté, formidable documentaire en creux sur la prison, qui recueillait la parole de la famille et des proches des détenus, la cinéaste Stéphane Mercurio suit l'équipe du Contrôleur général des lieux de privation de libertés (CGLPL), une autorité administrative indépendante créée en 2008, et pénètre cette fois dans les murs de l'institution carcérale, mais aussi dans un hôpital psychiatrique. Si ce documentaire est consacré au contrôle des droits fondamentaux des personnes enfermées, c'est aussi la pertinence de l'enfermement, et en particulier des longues peines, qu'on peut questionner. Comme le dit un détenu de la centrale de St-Martin de Ré, "on ne peut pas condamner un homme à 25 ans de prison et espérer qu'il sorte meilleur. Vous fabriquez des fauves !"

REUSSIR SA VIE (Benoît Forgeard, 4 avr) LLL
Un ovni filmique composé de trois court-métrages (et de drolatiques transitions) qui n'ont pas peur des sorties de route et qui cultivent un remarquable sens de l'absurde. Très original, l'humour a un petit quelque chose des Monty Python mais il y a aussi un peu de critique sociale : c'est fantaisiste mais absolument pas naïf. C'est assez soigné du côté formel, en particulier le dernier court-métrage. Mais cela ne ressemble à rien de formaté et c'est relativement dense tout en étant cohérent : ce ne sont pas de petites idées mises bout à bout, même s'il y a des effets de surprise (les scénarios ont tendance à bifurquer). Mention spéciale à Darius, le comédien commun aux trois histoires (mais dans des personnages différents).

MARTHA MARCY MAY MARLENE (Sean Durkin, 29 fév) LLL
Martha se réfugie chez sa soeur après avoir fui une secte. Elle tente de garder le secret de son absence prolongée, mais les épreuves passées ressurgissent dans sa mémoire... Peu de films traitent de la difficulté à sortir d'une secte (à part celui-là et Holy smoke, l'un des meilleurs Jane Campion). L'une des saveurs du film est que la vie embourgeoisée de la soeur et son mari semble elle aussi aliénante. Néanmoins, ce premier film n'est pas satirique, c'est un puzzle psychologique tout en suggestion. Elizabeth Olsen est impressionnante dans le rôle titre.

BULLHEAD (Michaël R. Roskam, 22 fév) LLL
Dans la Belgique flammande, Jacky, éleveur taciturne et violent, prospère dans le trafic d'hormones avec la complicité d'un vétérinaire véreux. Il s'inflige même le même traitement hormonal que les boeufs qu'il élève. Mais l'assassinat d'un policier bouleverse Jacky, tout comme ses retrouvailles avec un ami d'enfance... On peut reprocher au film un excès de testostérone, mais c'est le sujet qui veut ça. On pense d'abord à un film de mafia, mais c'est un traumatisme d'enfance qui est la clé du film. Dans le rôle principal, Matthias Schoenaerts est sidérant, tout en muscles, colère et frustration.

L'ENFANT D'EN HAUT (Ursula Meier, 18 avr) LLL
Simon, un gamin de 12 ans, vit seul avec sa grande soeur dans une cité de la Suisse d'en-bas. Mais il grimpe tous les jours sur les pistes d'une station de ski, pour aller dérober le matériel des touristes, qu'il revend ensuite à ses voisins... Comme dans Home, son premier film, la cinéaste s'intéresse à une famille dans une situation hors normes. Elle ne s'embarrasse pas d'explications, même si on finit par apprendre dans la deuxième moitié du film comment le préado et la jeune femme en sont arrivés là. C'est un véritable conte social, où tout n'est pas forcément vraisemblable, mais est rendu possible par l'ambiguïté insufflée par Kacey Mottet Klein et Léa Seydoux (décidément épatante) à leurs personnages.

LES ADIEUX A LA REINE (Benoît Jacquot, 21 mar) LLL
14 juillet 1789. En quatre jours, Versailles passe de l'insouciance à la panique. Benoît Jacquot évoque cette fin de régime en suivant certaines des femmes de la Cour, notamment à travers les yeux de Sidonie Laborde, la jeune lectrice (énamourée) de Marie-Antoinette. Benoît Jacquot reconstitue ces journées historiques comme si elles étaient au présent (n'est on pas à la fin d'un monde ?), en filmant amoureusement ses actrices (Léa Seydoux, Diane Kruger, Virginie Ledoyen), tout en étant caustique vis-à-vis de ses personnages. Contrairement à d'autres tentatives (Marie-Antoinette de Sofia Coppola), le point de vue ne peut pas être suspecté d'être contre-révolutionnaire, même si le peuple en mouvement est hors champ.

ELENA (Andreï Zviaguintsev, 7 mar) LLL
Vladimir, riche homme d'affaires vieillissant, et Elena, son ancienne et modeste infirmière, se sont mariés sur le tard. En apprenant que son mari compte léguer toute sa fortune à sa fille unique, née d'un premier mariage, Elena élabore un plan pour offrir à son propre fils et ses petits-enfants une vraie chance dans la vie. C'est un conte noir, qui vaut bien sûr pour les relations entre les personnages, mais aussi et surtout par l'excellence de sa mise en scène, froide et précise. Par exemple, les plans de départ tournés dans l'appartement luxueux de Vladimir et Elena sont d'une remarquable densité et confèrent tout de suite au film sa tension.

TUE-MOI (Emily Atef, 25 avr) LLL
Adèle, 15 ans, travaille à la ferme avec ses parents mais ne pense qu'à mettre fin à ses jours. Elle rencontre un évadé de prison et passe un pacte avec lui : elle l'aidera à s'enfuir s'il s'engage à la tuer au terme de sa cavale... Le début n'est certes pas un modèle de vraisemblance, mais on adhère assez vite, et surtout le film se bonifie au fil des séquences. Ce périple singulier commence dans la campagne allemande et finit à Marseille. La réalisatrice réussit un road-movie où les deux personnages évoluent mais de manière non linéaire, ce qui les rend passionnants et concourt à la tension du film.

ALOÏS NEBEL (Tomas Lunak, 14 mar) LLL
Automne 1989. Alors que la "révolution de velours" fait vaciller le régime tchécoslovaque, Aloïs Nebel, chef d'une gare de province perdue dans le brouillard, vit avec les fantômes de son passé. Notamment une autre période historique : la défaite de l'Allemagne nazie, et l'expulsion de la population germanophone des Sudètes en 1945... Adapté d'une BD, ce premier long métrage est en fait un film d'animation dans un noir et blanc somptueux. Le procédé utilisé, intitulé rotoscopie (animation calquée sur des images préalablement tournée avec de vrais acteurs), donne à ces images une puissance visuelle rare.

RADIOSTARS (Romain Levy, 11 avr) LL
Ben, qui se rêvait comique à New York, est de retour à Paris. Son ex lui fait rencontrer les présentateurs d'une émission de radio matinale et déconnante. Pour cause d'audience en berne, l'équipe doit partir en tournée tout l'été pour reconquérir ses auditeurs. Ben essaye de s'imposer comme leur nouvel "auteur de vannes"... Cette comédie lorgne moins vers Tandem (le plus beau film de Patrice Leconte) que vers la nouvelle comédie américaine (Judd Apatow). Les jeunes mâles arrogants et/ou immatures vont apprendre un peu de la vie, les répliques fusent, il y a aussi des gags récurrents autour du chauffeur de car androgyne... Bref un film inégal (pas toujours la classe) mais plutôt drôle et sympa.

38 TEMOINS (Lucas Belvaux, 14 mar) LL
En rentrant d'un voyage, Louise découvre qu'un meurtre horrible a eu lieu au pied de son immeuble, en pleine nuit. Aucun témoin, tout le monde dormait. Mais peu à peu elle apprend que 38 personnes ont vu ou entendu quelque chose, y compris son mari... Pendant une bonne moitié du film, on a peine à reconnaître la patte du cinéaste inspiré, le montage et les cadres semblant hésitants. Mais les trois derniers quarts d'heure prennent la dimension d'une véritable réflexion sur la nature humaine, bien servie par les interprètes (Yvon Attal, Sophie Quinton, Nicole Garcia, Natacha Régnier notamment).

BOVINES (Emmanuel Gras, 22 fév) LL
Un documentaire original qui pose sa caméra dans un champ et invite le spectateur à suivre le quotidien d'un troupeau de vaches. Aucun anthropomorphisme, le tout est filmé à hauteur d'animal (les êtres humains sont hors champ, si j'ose dire). Les plans sont souvent remarquables et contemplatifs. Mais ce que l'on retient est quand même l'action, notamment cette vache qui a l'idée de secouer un arbre pour faire tomber les pommes...

I WISH (Hirokazu Kore-Eda, 11 avr) LL
Deux frères sont séparés l'un de l'autre par le divorce de leurs parents. Un TGV va relier leurs deux villes, situées au nord et au sud de l'archipel japonais. Les garçons organisent un voyage jusqu'au point de croisement des deux premiers TGV mis en service, espérant que ce croisement générera une sorte d'énergie qui réalisera leurs voeux... Une oeuvre inégale mais délicate de Hirokazu Kore-Eda, ça ne se refuse pas, même si elle restera mineure dans la filmographie du cinéaste d'After life (1999) et Nobody knows (2004).

PERFECT SENSE (David MacKenzie, 28 mar) LL
Une curieuse pandémie se répand. Les personnes touchées perdent un à un leur cinq sens : d'abord l'odorat, puis le goût... Deux d'entre elles, une scientifique (Eva Green) et un chef-cuisinier (Ewan McGregor), tentent de vivre jusqu'au bout leur histoire d'amour naissante... Par son scénario, le film se place au croisement du film catastrophe et de la romance. Mais la mise en scène, assez maladroite, de David MacKenzie n'arrive pas à la hauteur de son sujet, peut-être bien une fausse bonne idée finalement. Reste le charme des deux interprètes principaux qui maintient un intérêt jusqu'au bout.

CLOCLO (Florent Emilio Siri, 14 mar) LL
La vie et l'oeuvre (si on peut dire) du chanteur adulé des années 60 et 70. Le film n'est pas désagréable du tout, et on se laisse prendre au jeu. Jérémie Renier assure bien dans le rôle principal. Mais on n'est loin d'un quelconque chef d'oeuvre : il s'agit d'un film essentiellement illustratif. Cela s'en ressent dans les dialogues, toujours explicatifs mais pas toujours naturels. Et deux scènes frôlent le ridicule : la création de Comme d'habitude d'un seul jet, sur un transat près de la piscine, et, plus gênant, le passage obligé de la scène de la baignoire à la fin.

NOUVEAU DEPART (Cameron Crowe, 18 avr) L
Matt Damon joue un père de famille veuf qui démissionne et s'installe au vert, et devient après un malentendu propriétaire d'un zoo qui vient de fermer. Ce dernier est encore entretenu par quelques employés dont une jeune femme interprétée par Scarlett Johansson. Devinez la suite... Je m'attendais davantage à un film récréatif qu'à un film créatif, mais là la mise en scène est vraiment lourdaude, soulignant chaque étape. Dommage car tous les personnages sont plutôt attachants, mention spéciale à Colin Ford qui joue le fils aîné du héros et à sa nouvelle voisine Elle Faning (déja appréciée dans Somewhere et Super-8).

CHRONIQUES SEXUELLES D'UNE FAMILLE D'AUJOURD'HUI (Jean-Marc Barr, Pascal Arnold, 9 mai) L
Jean-Marc Barr et Pascal Arnold, dont j'apprécie les films habituellement, savent filmer la sensualité. Ils en font l'unique argument de leur dernier film, qui montre une famille qui a décidé, suite à une bêtise du fils cadet (surpris au lycée en flagrant délit de masturbation), de lever le tabou sur la sexualité. Les deux auteurs sont plein de bonnes intentions, voulant traiter le sujet sans tomber dans la pornographie. Mais le résultat est confondant, tous les personnages ne sont montrés qu'en train de le faire ou d'en parler, et pour qu'aucun spectateur ne se sente nié, le film devient peu à peu un catalogue des différentes possibilités et orientations. Bref, artificiel.

SUR LA PLANCHE (Leïla Kilani, 1er fév) L
A Tanger, deux jeunes ouvrières qui décortiquent des crevettes rêvent de rejoindre les ouvrières des textiles. Tous les moyens sont bons. La meneuse est une véritable pile électrique qui décline sa rage en slam... Un sujet fort mais amoindri par son traitement (caméra à l'épaule systématique mais hésitante, direction d'actrices discutable) qui finit par agacer et ennuyer. Leïla Kilani est issu du documentaire, mais dans la fiction il lui manque encore la maîtrise des frères Dardenne.

L'HIVER DERNIER (John Shank, 29 fév) L
Un jeune éleveur se retrouve étranglé par les difficultés économiques. Ce premier film, tourné dans l'Aveyron par un réalisateur américain avec des jeunes interprètes français très talentueux (Vincent Rottiers, Anaïs Demoustier, Florence Loiret-Caille), avait de quoi séduire sur le papier. Mais si la photographie est souvent belle, le récit, convenu et assez minimaliste, déçoit et l'ennui s'installe.

LA VIDA UTIL (Federico Veiroj, 28 mar) L
Vieux garçon obsédé de cinéma, Jorge travaille depuis 25 ans à la Cinémathèque uruguayenne. Jusqu'au jour où elle ferme ses portes définitivement... Sur le papier, cela pouvait donner un film très intéressant, tourné en noir et blanc qui plus est. Le résultat est tout autre : le rythme est lent, mais sans conférer aux plans une véritable densité pour autant. Et si références au cinéma et à la cinéphilie il y a, le film n'en fait pas grand chose et reste scolaire. Bref, ennuyeux.

CHRONICLE (Josh Trank, 22 fév) L
Trois lycéens acquièrent involontairement des super pouvoirs. Mais au lieu de sauver le monde, ils les gardent secrets et les emploient à des fins autres... Cela aurait pu être réjouissant (Albert Jacquard rappelle souvent que le véritable surhomme n'est pas un homme doté de super pouvoirs mais la communauté des hommes elle-même). Malheureusement, la direction suivie par le film n'est pas celle-là. Les personnages sont décrits comme tous égoïstes (comme dans la vulgate libérale), et cela finit sans humour dans un paroxysme pyrotechnique assez abrutissant.
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Les films de début 2012

Louise Wimmer, Take shelter et 10 autres films

  • Bien : Louise Wimmer (Cyril Mennegun), Take shelter (Jeff Nichols), Sport de filles (Patricia Mazuy), Les Nouveaux chiens de garde (Gilles Balbastre, Yannick Kergoat), Un monde sans femmes (Guillaume Brac), Une nuit (Philippe Lefèbvre)
  • Pas mal : Amador (Fernando Leon de Aranoa), The Descendants (Alexander Payne), L'Amour dure trois ans (Frédéric Beigbeder), Elles (Malgorzata Szumowska),  Une vie meilleure (Cédric Kahn)
  • Bof : Parlez-moi de vous (Pierre Pinaud)

LOUISE WIMMER
(Cyril Mennegun, 4 jan) LLL
Louise Wimmer est le nom d'une femme proche de la cinquantaine, employée dans l'hôtellerie, en recherche d'un logement. En attendant, elle n'a pour lieu privatif qu'un box et dort dans sa voiture. Comment en est-elle arrivée là ? L'un des grands mérites de ce film est de n'être jamais démonstratif, et de se déployer tout entier dans le présent. Bien sûr on en saura plus au fur et à mesure. Mais l'autre grand mérite de cette première oeuvre réside dans son énergie. L'énergie de son personnage principal, peu liante mais toujours révoltée et digne, interprétée de façon magistrale par Corinne Masiero. L'énergie de la mise en scène aussi, qui évite tous les écueils : ni film coup de poing, ni film exagérément formaliste, la caméra trouve la bonne distance, sans coller à son héroïne ni la surplomber. Un coup d'essai déjà très maîtrisé.

TAKE SHELTER (Jeff Nichols, 4 jan) LLL
Le personnage principal, Curtis, est un ouvrier (ce n'est pas si fréquent dans le cinéma américain). Marié et père d'une petite fille, il est en proie à des rêves qu'il suppose prémonitoires, des visions d'apocalypse imminente, et est obsédé par l'idée d'en protéger les siens. Comme Melancholia de Lars Von Trier, le film associe maladie mentale et catastrophe céleste. Mais le traitement est différent. Jeff Nichols montre notamment les conséquences sociales de la maladie (ou du don) de Curtis, pour quelqu'un de son milieu. Le film vaut pour son interprétation (Michael Shannon, extraordinaire, et Jessica Chastain très bien en épouse douce et mélancolique, comme dans Tree of life), et surtout pour le brio de la mise en scène, digne des meilleurs films d'angoisse.

SPORT DE FILLES (Patricia Mazuy, 25 jan) LLL
Révoltée par la vente du cheval d'obstacle qu'on lui avait promis, Gracieuse, cavalière surdouée, claque la porte de l'élevage qui l'employait. Elle redémarre à zéro en acceptant de rentrer comme palefrenière dans le haras de dressage qui jouxte la ferme de son père... C'est le début du nouveau film de Patricia Mazuy, mais ce n'est peut-être pas la meilleure façon de l'évoquer. Car celui-ci n'a rien à voir avec une plate illustration d'un scénario. La cinéaste nous entraîne habilement dans cet univers sélect peu connu, par les divers rapports de subordination entre les personnages (mention spéciale à Bruno Ganz et Josiane Balasko), et également entre ceux-ci et les chevaux, mais aussi par des images bien senties (ah le bandeau vert de Gracieuse !). Marina Hands trouve en Gracieuse son meilleur rôle depuis Lady Chatterley. Une réussite.

LES NOUVEAUX CHIENS DE GARDE (Gilles Balbastre, Yannick Kergoat, 11 jan) LLL
Ce documentaire militant s'ouvre sur une archive savoureuse : l'éloge par Pierre Desgraupes, à une heure de grande écoute sur l'ORTF, des Chiens de garde, le pamphlet que Paul Nizan a écrit en 1932 contre les intellectuels gardiens de l'ordre établi... En 1997, Serge Halimi publie Les Nouveaux chiens de garde, pamphlet contre les intellectuels de cour d'aujourd'hui (éditorialistes vedettes, "experts") qui psalmodient la pensée unique. Ce film-ci s'en inspire, tout en exposant une analyse plus large des questions posées par la critique rigoureuse des médias, telle que pratiquée notamment par la salutaire association Acrimed. La forme choisie est moins libre et subversive que les documentaires de Pierre Carles, mais plus didactique, charpentée autour de trois mots-clés : indépendance, objectivité, pluralisme, avec de brillantes interventions (le journaliste Michel Naudy ou les économistes hétérodoxes Jean Gadrey et Frédéric Lordon).

UN MONDE SANS FEMMES (Guillaume Brac, 8 fév) LLL
Un peu de fraîcheur dans le cinéma français : cela nous vient des bords de la Manche, du côté de la Picardie. C'est l'été, et un drôle d'autochtone solitaire (Vincent Macaigne), plus tout jeune, voit débarquer une mère (Laure Calamy) et sa fille adolescente (Constance Rousseau, déjà vue dans Tout est pardonné) en vacances. Comme il n'y a pas de scénario mécanique, ce sont les interactions entre ces trois personnages, excellemment interprétés, qui constituent le sel (marin) de ce moyen métrage (58 mn). L'ambiance fait un peu penser au Conte d'été d'Eric Rohmer, en plus indécis et moins littéraire. Les images sont magnifiques. Une vraie sensibilité et un charme très insolite assez décalé par rapport aux productions actuelles, auteuristes comme industrielles.

UNE NUIT (Philippe Lefèbvre, 4 jan) LLL
La nuit du titre désigne à la fois l'unité de temps du film, mais aussi son espace : les établissements de la nuit parisienne (boîtes, cabarets etc), filmés dans une lumière bleue métallisée digne d'un polar américain. Philippe Lefèbvre, revenant au cinéma après plus de vingt ans d'absence, soigne son ambiance, et nous cale dans les pas d'un flic (Roschdy Zem, très crédible), chargé de faire respecter un minimum d'ordre et de justice et qui a le pouvoir d'autoriser ou non l'ouverture de ces établissements. Il est accompagné par son chauffeur d'un soir, Sara Forestier, presque à contre-emploi dans un rôle assez taciturne. Comment concilier proximité avec ce milieu et probité exigée par la police des polices ? Un enjeu classique mais revivifié avec brio.

AMADOR (Fernando Leon de Aranoa, 15 fév) LL
Une jeune immigrée latino, en couple avec un revendeur de fleurs à la sauvette, trouve un travail pour l'été : s'occuper d'Amador, un vieil homme bougon et alité. Entre ces deux mal-aimés s'installe une certaine complicité. Mais Amador meurt subitement, et ce n'est pas la fin du film ! C'est un joli film sur la précarité, doublé d'un dilemme moral, que Fernando Leon de Aranoa a réalisé. Un joli portrait de femme aussi, interprété par la subtile Magaly Solier. Le scénario est peut-être un petit peu trop tiré au cordeau : toutes les pièces du puzzle s'emboîtent parfaitement. Mais la conclusion vaut le détour.

THE DESCENDANTS (Alexander Payne, 25 jan) LL
A Hawaï, la vie d'une famille bascule. Parce que sa femme vient d'être hospitalisée suite à un accident de ski nautique et est dans le coma, Matt King tente maladroitement de se rapprocher de ses deux filles (10 et 17 ans). Il apprend que sa femme avait une liaison... L'argument du film aurait pu donner lieu à un mélo ou à une comédie acide. Alexander Payne a préféré un entre-deux plus réaliste, plus fédérateur aussi. Le cadre exotique participe à l'idée qu'il faut aller au delà des apparences superficielles. Des réunions d'affaire en chemises bariolées contribuent également au léger décalage du film. Le tout reste néanmoins assez classique, bien interprété (mention à George Clooney et Shailene Woodley), peut-être un poil trop sage voire moralisateur, dans le sens où le personnage de la femme adultère ne peut pas se défendre...

L'AMOUR DURE TROIS ANS (Frédéric Beigbeder, 18 jan) LL
Au début des années 2000, j'avais eu de l'intérêt certain pour l'ex-publicitaire repenti Beigbeder. J'avais lu d'abord 99 Francs, un pamphlet anti-publicité et anti-consumériste (dont Jan Kounen a depuis raté l'adaptation ciné). Puis L'Amour dure trois ans, et j'avais été touché par la sincérité du roman, et agréablement surpris par la profondeur qui perçait sous l'apparence du fin connaisseur de la nuit parisienne. Dix ans plus tard, l'adaptation ciné renverse la perspective : c'est la superficialité, voire la beaufitude des personnages qui frappe sous le vernis branchouille. Cela pourrait donner un navet, et heureusement le film est un peu mieux que cela, et même assez délectable au xième degré. Par l'accumulation de petites idées qui font mouche, mais aussi et surtout par l'abattage de Louise Bourgoin, qui détonne en adorable emmerdeuse.

ELLES (Malgorzata Szumowska, 1er fév) LL
Anne (Juliette Binoche), journaliste un peu bobo travaillant pour un magazine féminin, part à la rencontre de deux étudiantes parisiennes, Charlotte (Anaïs Demoustier) et Alicja (Joanna Kulig), qui se prostituent pour arrondir leurs fins de mois. L'atout de ce film, ce sont ses interprètes, toutes formidables. Ensuite, c'est surtout un cinéma de sensations, plus ou moins convaincantes, pour le meilleur et pour le pire. Certaines scènes semblent déjà vues, et on peine parfois à déchiffrer où la cinéaste polonaise veut en venir, et en quoi son regard se distingue des clichés.

UNE VIE MEILLEURE (Cédric Kahn, 4 jan) LL
Un cuisinier (Guillaume Canet) rencontre une serveuse (Leïla Bekhti), mère célibataire d'un garçon de 9 ans, ils s'aiment, puis projettent d'ouvrir un restaurant à eux, avec peu d'apport personnel. C'est le début des galères... Cédric Kahn démarre son film sur les chapeaux de roue, enchaînant les scènes à un rythme rapide. Ensuite, on a plus de mal à s'enthousiasmer. Est-ce le scénario (avec des personnages qui s'enfoncent dans les mauvais choix) ? Ou l'interprétation : si Leïla Bekhti assure, Guillaume Canet a plus de mal à rendre son personnage crédible... Un film qui a le mérite de ne pas édulcorer la réalité sociale, mais qui n'émeut que rarement.

PARLEZ-MOI DE VOUS (Pierre Pinaud, 11 jan) L
Karin Viard joue très bien Marina, une animatrice radio qui confesse les auditeurs chaque soir entre 21h et 23h. Et qui dans la vraie vie est plutôt psychoridige et recherche sa mère qui l'a abandonnée quand elle était toute petite... Peut-être que la note négative est sévère pour ce premier film dont le sujet n'est pas mauvais en soi. Les interprètes ne sont pas en cause, mais la sauce ne prend pas. Trop de grosses ficelles, notamment psychologisantes, nuisent à la crédibilité de l'ensemble, qui diffère peu d'une fiction télé anonyme.
Version imprimable | Films de 2012 | Le Dimanche 19/02/2012 | 0 commentaires
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