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Les films de l'été 2011

(sortis entre le 20 juin et le 20 septembre)


  • Chef d'oeuvre absolu : Melancholia (Lars Von Trier)
  • Bien : La Piel que habito (Pedro Almodovar), Un amour de jeunesse (Mia Hansen-Love), La Grotte des rêves perdus (Werner Herzog), Habemus Papam (Nanni Moretti), Les Contes de la nuit (Michel Ocelot), La Fée (Dominique Abel, Fiona Gordon, Bruno Romy), Pater (Alain Cavalier)
  • Pas mal : Super 8 (J.J. Abrams), La Guerre est déclarée (Valérie Donzelli), La Dernière piste (Kelly Reichardt), Présumé coupable (Vincent Garenq), Michel Petrucciani (Michael Radford), Les Bien-aimés (Christophe Honoré)
  • Hélas : L'Art de séduire (Guy Mazarguil)

MELANCHOLIA (Lars Von Trier, 10 aou) LLLLL
Première partie : Justine (Kirsten Dunst) se marie et donne une réception dans la somptueuse propriété de sa sœur (Charlotte Gainsbourg). Deuxième partie : la planète Melancholia entre dans le système solaire et risque de frôler la Terre, selon les scientifiques les plus optimistes... Un film de science-fiction qui ne ressemble à aucun autre, et qui commence comme une farce familiale à la Festen, en moins outrée. Lars Von Trier a créé une atmosphère très singulière, et même un univers particulier et tient la note jusqu'au bout. Un film catastrophe et intime à la fois. Des images splendides et une Kirsten Dunst insondable (prix d'interprétation mérité à Cannes, en dépit de la conférence de presse désastreuse du cinéaste, digne d'une séquence des Idiots et qui l'a sans doute privé de la Palme d'or !).

LA PIEL QUE HABITO (Pedro Almodovar, 17 aou) LLL
Depuis que sa femme a été victime de brûlures dans un accident de voiture, le docteur Ledgard (Antonio Banderas), éminent chirurgien esthétique, se consacre à la création d'une nouvelle peau grâce à laquelle il aurait pu la sauver. Dans la grande propriété isolée dans laquelle il travaille, une jeune femme (Elena Anaya) est séquestrée... C'est le début du nouveau film d'Almodovar, qui marche sur les traces de Franju (Les Yeux sans visage), mais son registre est le suspense psychologique et non l'effroi. Après coup, on se dit que les couleurs sont moins pétaradantes et les dialogues plus discrets que dans bon nombre des films du cinéaste. En fait, Almodovar adapte son style à l'histoire qu'il raconte. Et son sens de la narration, de la construction scénaristique, fait une nouvelle fois merveille.

UN AMOUR DE JEUNESSE (Mia Hansen-Love, 6 juil) LLL
Le film est une sorte de triptyque centré sur Camille, une jeune fille de 15 ans (puis 19 puis 23), et ses amours. Dans la première partie, elle aime intensément Sullivan, peu ou prou du même âge qu'elle. Ils se séparent, lui entamant un voyage en Amérique du Sud. Puis vient la première ellipse. Et là, le film, jusque là plutôt décevant par rapport aux deux premiers de la jeune cinéaste, se métamorphose, comme son héroïne (Lola Creton, 16 ans lors du tournage, impressionnante). Tout devient grâcieux, lumineux, à l'image des cours d'architecture que suit Camille. L'amour est le coeur de ce film, qui en explore toutes les profondeurs, tout en l'inscrivant dans des scènes de la vie quotidienne, comme chez Assayas (Fin août, début septembre). Ces amours sont d'autant plus crédibles qu'ils sont relativement avares de mots : le film ne repose pas sur des dialogues surécrits, tout passe par la mise en scène...

LA GROTTE DES RÊVES PERDUS (Werner Herzog, 31 aou) LLL
Werner Herzog, le réalisateur de Aguirre, la colère de Dieu et Fitzcarraldo, nous fait visiter, en 3D, la grotte Chauvet, découverte en 1994 et immédiatement interdite au public. Grâce à une myriade de spécialistes divers (archéologues, paléontologues, historiens d'art...), il tente de percer le mystère des splendides peintures rupestres du lieu, deux fois plus anciennes que celles de Lascaux, puisque remontant à plus de 30000 ans avant notre ère. Une belle méditation artistique et anthropologique...

HABEMUS PAPAM (Nanni Moretti, 7 sep) LLL
Après la mort du pape, le Conclave élit son successeur. Les favoris n'ayant pu se départager, c'est un outsider qui est élu. Mais ce cardinal ne supporte pas le poids d'une telle responsabilité. On fait appel à un psy... Sans réaliser le film à charge sur le Vatican qu'on attend de lui, Nanni Moretti filme avec une ironie discrète le choc savoureux entre les dogmes religieux et la psychanalyse. Il faut dire que c'est Michel Piccoli (impérial !) qui joue le pape défaillant et Moretti le psy... Sans être aussi magistral que les deux derniers films du cinéaste (La Chambre du fils, Le Caïman), celui-ci est d'une grande finesse et très plaisant.

LES CONTES DE LA NUIT (Michel Ocelot, 20 juil) LLL
Deux ados (un garçon et une fille) et un vieil homme, dans un théâtre de banlieue, mettent en scène six contes de toutes époques et de toutes latitudes. Le fait de se limiter à des histoires courtes donne à chacun de ces courts-métrages une impression d'épure. Michel Ocelot est un formidable conteur, plutôt malicieux. La technique utilisée est celle du théâtre d'ombres ou ombres chinoises : les personnages sont tout en noir devant des décors aux couleurs éclatantes mais jamais criantes. Ce qui donne au film une vraie poésie et une grande beauté plastique.

LA FEE (Dominique Abel, Fiona Gordon, Bruno Romy, 14 sep) LLL
Le nouveau film des réalisateurs de L'Iceberg et Rumba... Dom est veilleur de nuit dans un petit hôtel du Havre. Un soir, une femme arrive à l'accueil sans valise, pieds nus. Elle s'appelle Fiona, elle est une fée, et lui accorde trois souhaits. Dom lui en demande deux, réalisés dès le lendemain... Difficile de dire autre chose de l'intrigue, qui n'a d'ailleurs pas une importance capitale et est surtout prétexte à des gags parfois très acrobatiques et sophistiqués. Formellement, par rapport aux films précédents, on note une mise en scène plus découpée (plus de travellings, moins de plans-séquences fixes).

PATER (Alain Cavalier, 22 juin) LLL
Alain Cavalier joue au Président de la République et convoque Vincent Lindon pour faire son Premier ministre. Tous deux travaillent à la mise en place d'un salaire maximum. Le film est une sorte d'ovni, on y voit tour à tour les deux compères dans leur vraie vie (ou supposé telle), répétant leur rôle, ou en plein dans leur fiction, sans que le statut des images soit complètement défini... Derrière l'exercice de style ludique, une belle double réflexion : cinéphile (sur la forme) et citoyenne et politique (sur le fond : comment affronter l'oligarchie et réduire les inégalités). Plaisant.

SUPER-8 (JJ Abrams, 3 aou) LL
Nous sommes en 1979 (un reportage télévisé sur la catastrophe nucléaire de Three Mile Island en atteste). Un groupe de garçons d'une douzaine d'années réalisentent en super-8 un film de zombies et recrutent une fille un peu plus âgée qu'eux. Lors d'un tournage dans une gare désaffectée, ils sont témoins d'une catastrophe ferroviaire surnaturelle... Le film est un véritable hommage cinéphile au cinéma de Spielberg d'il y a 30 ans (nombreux emprunts, E.T. en tête, jusque dans les jeux de lumière). Les personnages sont subtils, de plus les spectateurs qui étaient enfants ou ados à l'époque retrouveront les jeux d'avant le numérique : bicross, talkie-walkie, rubik's cube... Néanmoins, des avalanches d'effets spéciaux gâchent un peu la fête. Et puis surtout Abrams est un moins bon conteur que son maître. Il se rattrape heureusement de façon artisanale à la toute fin du film (ne pas partir pendant le générique de fin).

LA GUERRE EST DECLAREE (Valérie Donzelli, 31 aou) LL
L'histoire autobiographique d'un jeune couple de trentenaires en prise avec la maladie grave de leur enfant... Le film est parfois maladroit dans sa forme, avec des essais sympathiques mais pas toujours transformés, notamment dans l'utilisation de la musique. Néanmoins, les rebondissements médicaux finissent par être assez efficaces. Surtout, l'intérêt du film, et son style, se situe dans les réactions des personnages : le couple vedette bien sûr (Valérie Donzelli, Jérémie Elkaïm), mais aussi leurs proches et les médecins (beaucoup de personnages secondaires très bien).

LA DERNIERE PISTE (Kelly Reichardt, 22 juin) LL
En 1845, une caravane de pionniers engage un guide pour trouver leur route à travers les montagnes de l'Oregon. Mais ils se perdent bientôt dans un désert de pierre... Le sujet pourrait être celui d'un western, mais le traitement est plus naturaliste. Kelly Reichardt s'attarde évidemment sur les paysages, mais aussi et surtout aux gestes du quotidien. En particulier les femmes jouent un grand rôle (Michelle Williams en tête) et négocient, ne se contentant pas de régler l'intendance. La lenteur du film, délaissé de toute scène d'action, peut néanmoins gêner sur la durée.

PRESUME COUPABLE (Vincent Garenq, 7 sep) LL
Tout le monde se souvient de l'affaire d'Outreau. D'abord un fait divers sordide, ensuite une énorme erreur judiciaire. Le film est centré sur le calvaire d'Alain Marécaux, d'après son livre-témoignage. C'est l'émotion qui est recherchée (avec un Philippe Torreton concerné) plus que la réflexion. Très peu d'idées de cinéma mais une réalisation nerveuse et assez efficace. Utile ? Peut-être, les déluges de lois sécuritaires et l'usage disproportionné de la détention préventive ayant continué à se développer depuis le scandale...

MICHEL PETRUCCIANI (Michael Radford, 17 aou) LL
Emouvant documentaire qui, grâce aux images d'archives et aux témoignages de ses proches (notamment ses anciennes compagnes), retrace la vie et l'oeuvre de Michel Petrucciani. Encore que l'oeuvre soit un peu délaissée ici (les extraits musicaux sont assez courts). Reste un pianiste d'exception aux prouesses techniques impressionnantes, et qui a combattu son handicap par une personnalité hors du commun. Une étoile filante.

LES BIEN-AIMES (Christophe Honoré, 24 aou) LL
Le film commence en 1963 et s'achève en 2008, en suivant l'itinéraire de Madeleine (Ludovic Sagnier puis Catherine Deneuve) et de sa fille (Chiara Mastroianni). Les personnages sont plutôt intéressants. Par contre, l'incorporation de moments historiques (intervention des chars russes après le printemps de Prague, attentats du 11 septembre 2001) paraît forcée. Et surtout la forme choisie (comédie musicale) ne semble pas d'une impérieuse nécessité (contrairement aux Chansons d'amour), malgré la signature d'Alex Beaupain pour les chansons. Christophe Honoré a certes soigné ses références (Demy, Nouvelle vague) mais un peu bâclé son film.

L'ART DE SEDUIRE (Guy Mazarguil, 27 juil) o
C'est l'histoire d'un psy qui va enfin pouvoir draguer une de ses patientes, qui met fin à sa thérapie... Pour confirmer la théorie de la relativité, les scientifiques attendent la preuve d'une matière invisible mais très pesante par rapport à la masse totale de l'univers. Ce film fait peut-être partie de la solution de l'énigme : il est inregardable et d'une lourdeur rarement atteinte...

Version imprimable | Films de 2011 | Le Vendredi 16/09/2011 | 0 commentaires




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