- Bien : Annie Colère (Blandine Lenoir), Le Lycéen (Christophe Honoré), Aucun ours (Jafar Panahi), Nous (Alice Diop), Godland (Hlynur Palmason), La (Très) grande évasion (Yannick Kergoat), Avatar : La Voie de l'eau (James Cameron), Les Pires (Lise Akoka, Romane Guéret), Joyland (Saim Sadiq), Les Banshees d'Inisherin (Martin McDonagh), La Petite bande (Pierre Salvadori)
- Pas mal : Mourir à Ibiza (Un film en trois étés) (Anton Balekdjian, Léo Couture, Mattéo Eustachon), She said (Maria Schrader), Stella est amoureuse (Sylvie Verheyde), Les Bonnes étoiles (Hirokazu Kore-eda), Falcon Lake (Charlotte Le Bon), La Passagère (Héloïse Pelloquet), Fumer fait tousser (Quentin Dupieux), Vivre (Oliver Hermanus)
- Bof : Nos frangins (Rachid Bouchareb)
- Hélas : Simone, le voyage du siècle (Olivier Dahan)
ANNIE COLERE (Blandine Lenoir, 30 nov) LLL
Il y a quelques semaines est sorti un biopic sur Simone Veil (cinématographiquement très discutable), qui fait un carton en salles. Le nouveau film de Blandine Lenoir traite aussi de la conquête du droit à l'avortement, mais il ne fait absolument pas double emploi, car sa focale est toute autre. En effet, il s'intéresse aux activités concrètes d'une antenne locale du MLAC, au début de l'année 1974. Et cela change tout. Il y a beaucoup de talent et de conviction à tous les étages : scénario, co-écrit avec Axelle Ropert, interprétation (si l'on en attendait pas moins de Laure Calamy et Zita Hanrot, toujours excellentes, Rosemary Standley, que je ne connaissais pas, est inoubliable). Et la mise en scène de Blandine Lenoir est toujours juste, certes pas révolutionnaire d'un point de vue strictement formel, mais sans fausse note. Une bonne surprise et un film important.
LE LYCEEN (Christophe Honoré, 30 nov) LLL
Il y a souvent des deuils dans les films de Christophe Honoré. C'est le cas notamment pour Lucas (Paul Kircher), lycéen de 17 ans, dont le père disparaît dans un accident de la circulation, quelques jours après une première sortie de route sans conséquence. La grande force du film, c'est de faire ressentir la perte, sans jamais tomber dans l'émotion facile. Honoré rejoue un peu de son adolescence, mais en la transposant à l'époque actuelle. Avec la maturité, il arrive à livrer une oeuvre dont le paradoxe est de nous faire passer par beaucoup d'émotions différentes, alors même qu'au niveau artistique (cadre, lumière, musique) le film garde une prenante unité. L'interprétation, homogène, est au diapason. Le cinéaste réussit la surface comme la profondeur, et livre une de ses oeuvres les plus convaincantes.
AUCUN OURS (Jafar Panahi, 23 nov) LLL
Si le sous-texte n'était pas si grave, on pourrait dire qu'il s'agit d'une autofiction, dans laquelle Jafar Panahi joue son propre rôle de cinéaste. Il tourne un film autour d'une histoire d'amour contrariée par un exil qui ne s'offre qu'à l'une des deux et qui pourrait les séparer, histoire inspirée de la réalité vécue par les interprètes. Redoutant d'être arrêté, Panahi n'est pas présent sur le tournage, mais le dirige via internet, depuis une maison louée dans un village près de la frontière. Dans ce village, il est témoin d'une autre histoire d'amour compliquée (pour d'autres raisons). Avec très peu de moyens, Jafar Panahi (le vrai) multiplie les niveaux de lecture, et livre un film courageux, ultime pied de nez avant sa réelle arrestation et incarcération en juillet 2022 (comme deux de ses collègues, Mohammad Rasoulof et Mostafa Al-Ahmad).
NOUS (Alice Diop, 16 fév, rattrapé en DVD) LLL
Librement inspirée par Les Passagers du Roissy-Express, un récit documentaire écrit par François Maspero en 1990, Alice Diop rencontre des riverains de la ligne B du RER. Il y a un aspect mosaïque dans la juxtaposition de ces séquences, où, malgré la durée contrainte, on donne à chaque personne un peu de temps au temps. C'est l'avantage immense du cinéma sur la télévision, dans les degrés de liberté permises à l'écriture du documentaire. Tout en étant en constante ouverture vers les autres, Alice Diop assume un caractère personnel à sa démarche, en incluant au montage des archives de sa famille. L'une des personnes qu'elle suit est également sa propre soeur, infirmière à domicile (et qui ouvre donc beaucoup de portes). Le résultat est un film inclusif envers des petites gens de toutes origines et de milieux sociaux divers, impression renforcée par le titre choisi, comme par la chanson de Jean Ferrat qui clôt le film (la France ainsi filmée semble complètement inédite par rapport aux regards racoleurs et politiquement douteux véhiculés par certaines chaînes de télévision).
GODLAND (Hylnur Palmason, 21 déc) LLL
Vers la fin du XIXè siècle (ou approximativement vers l'an -110 avant Björk, si vous préférez), un pasteur danois est envoyé dans un coin reculé de l'Islande, avec pour mission d'y bâtir une église, et de prendre des photographies... La première partie raconte l'odyssée périlleuse, face aux éléments, pour arriver à destination, tandis que la seconde partie traite de l'insertion dans une communauté et de la construction de l'édifice religieux. Le format presque carré de l'image est en symbiose avec les daguerréotypes pris par le prêtre, et donne du cachet aux paysages traversés comme aux personnages, même si la partie communautaire est plus classique dans sa narration. Hlynur Palmason a adopté un style qui lui est propre, qu'on pourrait situer à équidistance de Werner Herzog et de Jane Campion.
LA (TRES) GRANDE EVASION (Yannick Kergoat, 7 déc) LLL
Yannick Kergoat, monteur professionnel, avait déjà coréalisé avec Gilles Balbastre Les Nouveaux chiens de garde. Ici,il s'attaque à l'évasion fiscale. Comme dans le précédent film, c'est avant tout un film de montage sur un sujet qu'on croit connaître d'avance, mais y consacrer une heure et demie change un peu la donne. De même, le réalisateur assume d'accompagner les spectateurs/trices par des commentaires pêchus et ironiques, à l'image des infographies qui essayent de présenter de façon didactique les montages financiers qui permettent cette évasion. Face à ce fléau, les solutions existent, mais la volonté politique pas encore (a fortiori si les forces politiques susceptibles de s'y attaquer n'ont pas accès à une campagne électorale médiatique équitable).
AVATAR : LA VOIE DE L'EAU (James Cameron, 14 déc) LLL
Titanic pouvait se lire comme une critique du gigantisme, de la vitesse et du toujours plus, et des comportements de classe lorsque la catastrophe arrive. Le premier Avatar condamnait clairement l'extractivisme et le néocolonialisme. En somme, en portant une critique systémique, Cameron était une sorte d'écologiste plus à gauche que Cohn-Bendit et Jadot, aux visions plus compatibles avec les exigences du capital. Dans ce nouvel opus, ces préoccupations politiques passent nettement au second plan. Cameron semble même importer sur Pandora une vision très classiquement hollywoodienne des combats guerriers comme de la centralité de la cellule familiale et de son fonctionnement genré. L'écologie y est devenue avant tout spirituelle, avec des scènes centrales visuellement superbes : dans le milieu aquatique, le réalisateur de Abyss est vraiment dans son élément, ce qui est source d'émerveillements. Au point de peut-être interpréter de façon un peu trop littéral le slogan "Nous sommes la nature qui se défend".
LES PIRES (Lise Akoka, Romane Guéret, 7 déc) LLL
Un cinéaste plus tout jeune veut réaliser pour son premier film une fiction qui met en scène des enfants défavorisés d'une petite cité du Nord de la France. Au casting, il choisit des mômes qui ont déjà vécu. Et le tournage commence... Les mises en abyme sont légion au cinéma, mais celle-ci a pour particularité de tourner autour d'un cinéma social s'intéressant à l'enfance (on peut penser, dans le meilleur des cas, à certains films de Doillon ou plus récemment certains opus des Dardenne). Le film montre plutôt avec bienveillance les petites mains de l'artisanat cinématographique, tout en s'interrogeant sur l'éthique du réalisateur (la distance sociologique avec son sujet, ses méthodes - manipulatoires ? - pour faire vrai). Les Pires, qui tient finalement lui aussi du cinéma "social", contient en germe sa propre critique, mais se révèle chaleureux voire émouvant, malgré la conscience de ses limites.
JOYLAND (Saim Sadiq, 28 déc) LLL
Haider est au chômage, mais sa femme Mumtaz travaille. Pour occuper ses journées, il est un peu homme à tout faire dans la demeure familiale qu'il partage avec son père âgé, son frère, sa belle-soeur et leurs enfants. Plus ou moins méprisé par les autres hommes de la famille, il accepte un emploi, qui s'avèrera assez particulier, puisqu'il s'agit d'être danseur dans un cabaret érotique sous l'ordre de Biba, une meneuse de revue transsexuelle qui l'intrigue. Par suite Mumtaz est invitée par les membres de la famille à quitter son emploi pour s'occuper à la maison des tâches auparavant confiées à Haider... Intelligemment mis en scène, le premier film de Saim Sadiq interroge crûment les schémas patriarcaux, pour les hommes comme pour les femmes. On peut prévenir que le dénouement est assez abrupt. Premier film pakistanais sélectionné à Cannes, et récipiendaire de surcroît de la Queer Palm !
LES BANSHEES D'INISHERIN (Martin McDonagh, 28 déc) LLL
Colm annonce à Padraic la rupture de leur amitié. Le second tombe des nues, ils avaient pour habitude de se retrouver partager une pinte chaque jour au pub situé au sommet d'Inisherin, une petite île au large de l'Irlande. Est-ce irrévocable ? Padraic va tenter de la savoir, parfois aidé par sa soeur (qui partage le même foyer). Sur le papier, il n'est pas certain que le scénario soit si remarquable. Mais le cinéma, c'est l'art et la manière. Et ce conte cruel, parfois jusqu'à l'absurde, bénéficie d'une mise en scène classique mais inspirée, dans des paysages qui en imposent. Et, face à Brendan Gleeson, grand acteur irlandais (le Général de John Boorman, c'était lui !), Colin Farrell est très crédible dans le rôle de celui que tout le monde trouve un peu creux...
LA PETITE BANDE (Pierre Salvadori, 20 juil, rattrapé en DVD) LLL
Le film, sorti en catimini au milieu de l'été, a disparu si vite des salles que je l'ai rattrapé sur le petit écran. Commercialement un échec, il mérite pourtant d'être vu. Une bande de gamins d'une douzaine d'années tente d'incendier l'usine qui pollue leur rivière. Chacun a son caractère, et ses raisons plus ou moins avouables. Et, bien entendu, la petite entreprise sera bien compliquée à mettre en oeuvre. Voilà un film à vocation peut-être familiale mais qui ne verse pas dans l'angélisme. La comédie est inquiète, voire grave, mais contrebalancée par un humour burlesque dans lequel Pierre Salvadori est passé maître, même s'il l'adapte ici à l'âge des protagonistes. Certains spectateurs plus âgés pourront remarquer qu'en sous-texte la conscience écologique mobilisée ici n'a rien d'un idéalisme qui planerait au-dessus des conditions réelles d'existence.
MOURIR A IBIZA (Anton Balekdjian, Léo Couture, Mattéo Eustachon, 7 déc) LL
Une fille dans la vingtaine, en vacances à Arles, rencontrent deux garçons, et cherchent à en rejoindre un troisième, bien décidée à mieux le connaître. Au départ, on pourrait penser à un schéma rohmérien (intemporel), même si le film a des aspects plus contemporains. En réalité, il est plus aventureux et plus incertain : il suit l'évolution des relations entre les quatre jeunes gens au cours de trois étés successifs (escales à Etretat et Ibiza pour les deux derniers). Le film est tourné à six mains, probablement dans l'ordre chronologique (la technique s'étoffe : voix off, séquences musicales). Un peu à l'image de ses protagonistes, il semble s'inventer en chemin : c'est ce qui fait son charme buissonnier. Une fragile, hésitante mais plutôt jolie éclosion.
SHE SAID (Maria Schrader, 23 nov) LL
Reconstitution de l'enquête journalistique réalisée en 2017 par Jodi Kantor et Megan Twohey pour le New York Times, sur les agissements du producteur de cinéma Harvey Weinstein. Dans la vraie vie, l'onde de choc a provoqué le mouvement MeToo et la prise de conscience de l'importance des violences sexuelles (pas seulement par des hommes puissants). Cinématographiquement, l'onde de choc est plus modeste : formellement, le film s'inscrit dans les pas des Hommes du président ou de Spotlight, sans parvenir à la même intensité. En revanche, il atteint une certaine justesse dans l'écriture et l'interprétation, notamment grâce aux subtiles Zoe Kazan et Carey Mulligan qui campent les deux enquêtrices qui avancent avec tact et persévérance.
STELLA EST AMOUREUSE (Sylvie Verheyde, 14 déc) LL
Sylvie Verheyde redonne vie au personnage de Stella, fille d'un couple de bistrotiers (qui bat de l'aile). Elle a maintenant 17 ans, c'est l'année du bac. Elle n'est pas très intéressée par les études, et découvre une discothèque qui l'inspire davantage. Lycéenne peu à l'aise le jour, mais vaillant papillon de nuit dans les soirées. Le film est modeste, avec des défauts, mais se révèle néanmoins assez attachant. Stella tranche de part sa situation sociale (la mère a du mal à boucler les fins de mois) avec les jeunes filles habituelles du cinéma français (le film est de ce point de vue plus proche de Passe ton bac d'abord de Pialat que du très branché Eden de Mia Hansen-Love), et Flavie Delangle l'interprète avec finesse et nuance.
LES BONNES ETOILES (Hirokazu Kore-eda, 7 déc) LL
Une toute jeune mère abandonne son enfant dans une "boîte à bébés", où il est récupéré pour être vendu au marché noir de l'adoption. Rongée de remords, elle fait équipe avec les kidnappeurs du nourrisson pour prendre sa part dans la vente, mais aussi pour rechercher les meilleurs parents pour l'enfant. Il est souvent question de famille dans les films de Kore-eda, mais il s'agit de moins en moins de liens du sang ! Si on a un peu de peine à retrouver les mêmes qualités cinématographiques que dans ces précédents opus, le cinéaste arrive à faire exister des personnages atypiques, avec notamment la star coréenne Song Kang-hoo (récompensée pour ce rôle à Cannes).
FALCON LAKE (Charlotte Le Bon, 7 déc) LL
Un garçon de 13 ans et demi, qui rentre dans l'adolescence, et une fille de 16 ans, plus ou moins prête à en sortir. Ils se rencontrent près d'un lac au Québec, lieu nimbé d'un certain mystère (comme dans L'inconnu du lac, mais en version habillée). La famille du premier est en vacances et est invitée dans la maison de la mère de la seconde. Le récit a une part d'indétermination et de flottement qui rend le film intéressant, même s'il y a des figures imposées (la peur de l'eau du garçon peut symboliser sa crainte de la sortie de l'enfance et des relations amoureuses ou charnelles). L'évocation d'un fantôme est un peu moins réussi (Céline Sciamma avait mieux convoqué les superstitions adolescentes dans Naissance des pieuvres). L'ensemble est plutôt inabouti, mais prometteur.
LA PASSAGERE (Héloïse Pelloquet, 28 déc) LL
Un couple de marins pêcheurs prend le jeune Maxence comme apprenti. Peu à peu, une attirance se crée entre la femme de 45 ans et son subordonné... Héloïse Pelloquet semble s'appliquer dans les scènes de pêche comme dans les scènes intimes. Malgré cela, la réalisation reste plus plate que la mer (pas si calme car battue par les vents). Dommage, car les interprètes y croient : Cécile De France, mûre et sensuelle, Félix Lefebvre, révélé par Eté 85, et Grégoire Monsaingeon, tout en finesse. Heureusement, l'autrice soigne son épilogue, particulièrement réussi : dès son premier film, elle sait comment le terminer, ce qui n'est pas si fréquent.
FUMER FAIT TOUSSER (Quentin Dupieux, 30 nov) LL
Moins de six mois après la sortie du réjouissant Incroyable mais vrai, Quentin Dupieux revient déjà sur les écrans. Il invente une TabacForce, une bande de justiciers habillés façon Bioman, qui combat les ennemis en envoyant des faisceaux de fumées de cigarettes. Mais nous ne verrons guère leurs exploits, leur chef (un rat baveux qui a la voix de Chabat) les envoie au vert pour ressouder l'équipe. Ce sont les histoires qu'ils se racontent à la veillée qui constituent le film. Le casting est royal (Demoustier, Lellouche, Amamra, Zadi, Lacoste), les sketchs sont inégaux et parfois trash (le meilleur est celui du casque de pensée avec Dora Tillier). Il y a des séquences très étirées, mais qui peuvent être sauvées par une idée absurde qui débarque sans crier gare.
VIVRE (Oliver Hermanus, 28 déc) LL
Un employé de mairie apprend qu'il n'a plus que six mois à vivre. Alors qu'il semblait auparavant démotivé dans une vie de bureau terne, le voici qui se remet à vivre, d'une certaine façon. Si vous n'avez jamais vu le grand classique d'Akira Kurosawa, dont c'est le remake, vous pourrez apprécier les grandes lignes et la philosophie de l'histoire, écrite par le prix Nobel de littérature Kazuo Ishiguro. La transposition dans le Londres des années 1950 est passable. Evidemment la mise en scène n'égale pas celle du maître. Mais la performance de Bill Nighy, grand acteur britannique, apporte du crédit à cette version.
NOS FRANGINS (Rachid Bouchareb, 7 déc) L
Le film semble prendre sa part du devoir de mémoire envers Malik Oussekine et Abdel Benyahia, tués le même jour par des policiers dans la nuit du 5 au 6 décembre 1986, mais pas dans les mêmes circonstances. Le premier, tué par des "voltigeurs" en marge des manifestations étudiantes contre la loi Devaquet, est resté dans la mémoire collective, pas le second, abattu par un policier ivre en civil. La seconde mort a été invibilisée pendant 48h, et cachée à la famille. Le film le montre, mais pas forcément très habilement : formellement on voit pas mal d'archives télévisées, parfois insérées dans des scènes reconstituées à la manière de ces archives (d'où possible confusion). J'ai eu l'impression de n'avoir vu que des scènes d'exposition, et que l'action n'avait jamais vraiment commencé. C'est que le film se cantonne aux trois premiers jours. L'autre écueil de ce choix, c'est qu'il montre le père d'Abdel, qui a l'habitude de courber l'échine, sonné par la mort de son fils. Et qu'il occulte la création du comité Justice pour Abdel, et les manifestations dans lesquelles le père et la mère (totalement absente du film de Bouchareb) ont pris part activement (ils ne sont pas restés passifs, et se sont mobilisés pour ceux qui restent...).
SIMONE, LE VOYAGE DU SIECLE (Olivier Dahan, 12 oct) 0
Un carton au box-office, mais au niveau cinéma c'est un supplice du début à la fin. Il y a un quart de siècle, des films ont été critiqués pour beaucoup moins que cela. Ces critiques étaient bien sûr recevables par principe, même si les réalisateurs avaient voulu ou cru parier sur l'intelligence du spectateur (ce qui n'avait pas empêché des querelles d'interprétation sur certaines scènes). Alors même que la bête immonde revient, quel est le pari d'Olivier Dahan ? Pas trop sur l'intelligence du spectateur en tout cas. Comment peut-on filmer en utilisant en permanence de tels procédés grossiers ? Comment peut-on mettre une musique pareille, envahissante, sur de telles images ? Si les scènes de "reconstitution" sont douteuses, les scènes ordinaires sont tout autant médiocres, ni plus ni moins. Un tour de manège mémoriel dépourvu de sobriété (ou alors Lelouch c'est du Robert Bresson). Elsa Zylberstein a du mal à exister derrière le maquillage ostentatoire (comme si l'important était la ressemblance physique). Quand elles ne relèvent pas de la pseudo-virtuosité gratuite, ces scènes virent à la propagande sur un contenu lui-même discutable. On a droit par exemple à des leçons de morale en voix off, sans contradiction, qui brillent par leur anachronisme (l'Europe vue comme favorisant je cite la démocratie et la solidarité entre les peuples, alors que l'Union européenne existante aujourd'hui institutionnalise des politiques qui démantèlent les mécanismes de solidarité et qui pourraient bien être à l'origine de la montée de l'extrême droite dans tous les Etats membres). La bonne parole se clôt sur des enfants filmés en contre-plongée sous un ciel radieux. Pitié ! Il y a certes des éléments intéressants dans le film (on essaie de se raccrocher aux personnages, au sujet traité), mais surtout beaucoup de maladresses...
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